La Cour suprême du Canada a tranché, vendredi, en faveur de trois travailleuses de la santé de la Colombie-Britannique qui soutiennent avoir développé un cancer du sein en raison de leur emploi.

Katrina Hammer, Patricia Schmidt et Anne MacFarlane font partie des sept employées d'un laboratoire de l'hôpital Mission Memorial à avoir souffert d'un cancer du sein.

La Commission des accidents de travail de la Colombie-Britannique avait d'abord rejeté leur demande d'indemnisation, affirmant que le cancer du sein n'était pas une maladie professionnelle.

Mais des décisions rendues par le tribunal administratif de la Commission en 2010 et 2011 ont renversé le premier verdict et établi un lien entre le cancer et le milieu de travail des plaignantes.

La Cour d'appel de la province a toutefois statué que ces décisions étaient «manifestement déraisonnables» parce qu'il n'existait aucune preuve que le cancer dont étaient atteintes les femmes avait été causé par leur environnement professionnel, et que le tribunal avait ignoré les témoignages d'experts affirmant le contraire. Selon la cour, ces cas relevaient de l'anomalie statistique.

Vendredi, la Cour suprême s'est prononcée à six contre un en faveur des trois femmes.

Le juge Russell Brown, écrivant au nom de la majorité, a décrété que les conclusions du tribunal administratif de la Commission n'étaient pas «manifestement déraisonnables».

«Bien que le dossier sur lequel reposait la décision ne contienne aucune preuve d'expert confirmative, le Tribunal s'est néanmoins fondé sur d'autres éléments de preuve qui, perçus de façon raisonnable, pouvaient étayer sa conclusion quant à l'existence d'un lien causal entre le cancer du sein des employées et leurs conditions de travail», a-t-il expliqué.

Le juge Brown a indiqué que le fardeau de la preuve était moins lourd dans ce genre de cas et que la loi devait se ranger du côté des plaignantes.

«Si la valeur probante des éléments de preuve tendant à indiquer que la maladie a été causée par le travail est à peu près équivalente à celle des éléments de preuve tendant à indiquer le contraire, la question du lien de causalité sera tranchée en faveur du travailleur», a-t-il souligné.

La magistrate dissidente, Suzanne Côté, s'est dit fortement en désaccord avec ses collègues.

«Selon mon analyse, il n'existe dans ce dossier aucun élément de preuve - et certainement aucun élément de preuve positive - susceptible d'étayer l'existence d'un lien de causalité entre l'emploi des employées et le développement de leur maladie respective.»

Le jugement rendu permettra au Tribunal d'appel de compensation des travailleurs de déterminer la causalité d'une maladie basée sur l'environnement et les conditions de travail sans avoir besoin d'une preuve scientifique rigoureuse ou de l'intervention d'une cour de justice, a souligné Tonnie Beharell, une avocate représentant l'Association des sciences de la santé de Colombie-Britannique ainsi que ses membres Katrina Hammer et Anne Mac Farlane.

De nombreux cas de cancers du sein ont été répertoriés parmi des employées du laboratoire de l'hôpital Mission Memorial depuis 1990, a rappelé l'avocate. Seulement entre 2000 et 2005, six cas ont été constatés.

«Il y avait des preuves démontrant qu'il y avait un groupe de cas statistiquement significatif, et que le taux d'incidence du cancer était d'environ huit fois celui auquel on pouvait s'attendre dans la population en général en Colombie-Britannique, mais nous ne savons (toujours) pas quelle est la cause», a ajouté Tonnie Beharell.

La présidente de l'Association des sciences de la santé de Colombie-Britannique, Val Avery a par ailleurs remercié les trois femmes qui ont gagné leur bataille judiciaire pour leur persévérance.

Ces femmes, qui sont toutes âgées aujourd'hui d'une cinquantaine d'années, sont en rémission. Il n'a pas été possible d'entrer en contact avec aucune d'entre elles pour recueillir leurs commentaires. Même chose pour l'autorité sanitaire Fraser, qui est responsable de l'hôpital Mission Memorial, qui n'a pas pu être jointe dans l'immédiat.