Inspirée par le récent jugement de la Cour suprême du Canada qui a reconnu l'importance du droit de grève pour les travailleurs, la CSD contestera devant le tribunal une loi adoptée par Québec, qui n'accorde pas de droit de grève à ceux qu'on appelle les ressources intermédiaires et les ressources de type familial.

Ces «ressources» sont des personnes qui hébergent à leur domicile des enfants ou des adultes ayant besoin de soins et services, pour le compte d'établissements de santé. La Centrale des syndicats démocratiques en représente 3500 dans l'ensemble du Québec, mais d'autres sont syndiqués auprès d'autres organisations.

La «Loi sur la représentation des ressources de type familial et de certaines ressources intermédiaires», qui est contestée par la CSD, accorde à ces travailleuses le droit d'exercer des moyens de pression, mais pas celui de faire la grève.

«Tout moyen de pression concerté ayant pour effet de priver un usager d'un service auquel il a droit ou d'en diminuer la qualité, pendant la durée d'une entente collective, est prohibé», est-il stipulé dans la loi.

«Honnêtement, notre opinion, c'est qu'à part de porter des macarons, il n'y en a pas de moyens de pression qui sont possibles. C'est ça qu'elle dit la loi», a résumé Me Denis Bradet, qui portera la cause devant la Cour supérieure pour la CSD.

Or, dans un arrêt rendu plus tôt cette année concernant une loi sur les services essentiels en Saskatchewan, la Cour suprême du Canada avait reconnu l'importance du droit de grève pour les travailleurs, afin d'établir un certain équilibre dans le rapport de forces entre les parties impliquées dans un conflit.

Au cours d'une rencontre avec la presse, lundi, pour expliquer sa requête devant la Cour supérieure, la CSD a dit souhaiter que ces ressources intermédiaires et familiales puissent au moins réclamer un arbitrage, à défaut de bénéficier du droit de grève.

Les syndicats de policiers municipaux, par exemple, ne bénéficient pas du droit de grève en vertu du Code du travail. Pour compenser, toutefois, ils peuvent demander l'arbitrage.

«L'arrêt de la Cour suprême du Canada a reconnu que le droit de grève était aujourd'hui un droit qui était protégé par la Charte des droits et libertés et qu'en conséquence, tous les salariés devaient avoir ce droit ou, s'ils ne pouvaient avoir ce droit en raison de leurs activités - et c'est le cas des ressources -, il devait y avoir un mécanisme qui leur permet d'établir un équilibre dans le rapport de forces. Et ce mécanisme peut être un arbitrage de différend», a résumé le président de la CSD, François Vaudreuil.

Cette cause a été rendue possible par l'arrêt de la Cour suprême, rendu le 30 janvier dernier, qui a clarifié l'importance du droit de grève et son rôle. «C'est vraiment une évolution du droit qui fait qu'on est ici aujourd'hui», a concédé Me Bradet.

La cause prendra un certain temps avant d'être entendue, vraisemblablement pas avant 2016.

Ce secteur des ressources intermédiaires n'en est pas à ses premières tribulations avec le milieu légal. Il y a plusieurs années, une loi du gouvernement du Québec leur avait interdit de se syndiquer, sous prétexte qu'il ne s'agissait pas véritablement de salariés. Cette loi leur interdisant de se syndiquer avait été invalidée par le tribunal et, en pleine campagne électorale, le gouvernement de Jean Charest avait choisi de ne pas interjeter appel du jugement. Depuis, plusieurs organisations syndicales se font la lutte pour les représenter.