Un policier de la Sûreté du Québec s'est vu imposer une suspension sans solde de 10 jours pour conduite dangereuse avec son auto-patrouille lors d'un appel d'urgence, survenu en septembre 2012.

Cette décision risque d'alimenter la discussion autour de la révision de la décision du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de ne pas poursuivre un policier dont la conduite est à l'origine du décès d'un enfant de 5 ans, en février dernier, à Longueuil.

Dans ce cas-ci, la décision du Comité de déontologie policière, prise le 25 novembre dernier, mais rendue publique jeudi, indique que l'agent Patrick Smith «a manqué de jugement et de discernement» alors qu'il conduisait son auto-patrouille.

L'agent Smith répondait à un appel prioritaire dans la MRC de Salaberry-de-Valleyfield, où une ambulance avait aussi été appelée.

Il avait traversé un arrêt obligatoire à plus de 35 kilomètres à l'heure et avait été heurté de plein fouet par la voiture d'une dame qui circulait sur la rue transversale qui, elle, n'était pas soumise à un arrêt obligatoire. La dame avait été transportée à l'hôpital et avait dû recevoir des traitements de physiothérapie et d'ergothérapie pour des entorses cervicale et dorsale.

Selon la preuve analysée par le Comité de déontologie, il semble que les gyrophares fonctionnaient mais que la sirène n'ait été actionnée qu'en arrivant à l'intersection.

«S'il est passé à une vitesse minimale de 35 à 43 kilomètres à l'heure, comme en conclut notre expert, et qu'il n'a pas fait son arrêt, ça ne laisse pas de temps de réaction. Le comité en est arrivé à la conclusion qu'il y avait là un manque de prudence et de discernement», a expliqué en entrevue à La Presse Canadienne Me Maurice Cloutier, qui agissait à titre de procureur pour le Commissaire à la déontologie policière devant le Comité.

«Lorsqu'un policier actionne ses gyrophares, c'est bien, mais il doit quand même s'assurer en arrivant à un arrêt ou à un feu rouge que, lorsqu'il passe - parce que le code de la sécurité routière le permet - il doit le faire sans danger pour la vie des autres conducteurs, a poursuivi Me Cloutier. Dans ce cas-ci, l'autre conductrice ne pouvait pas s'attendre à voir un véhicule surgir devant elle alors qu'elle n'a pas d'arrêt à faire.»

Dans sa décision, le Comité reconnaît que «la conduite d'un véhicule de police en déplacement d'urgence doit être adaptée pour répondre rapidement et efficacement aux appels», mais il rappelle que «cela doit être fait en toute sécurité» et note que «le policier n'a actionné sa sirène qu'au moment où il s'engageait dans l'intersection», alors qu'il «aurait dû prendre les moyens raisonnables pour éviter le danger».

La décision tient toutefois compte du fait que l'agent Smith a reconnu sa faute, évitant à plusieurs témoins de se déplacer. L'avocat du policier réclamait une suspension sans solde de quatre jours mais le Comité a choisi de pencher en faveur de la suspension de dix jours suggérée par le Commissaire.

Dans le cas de Longueuil, le policier de la Sûreté du Québec conduisait à plus de 120 kilomètres à l'heure dans une zone de 50 et, bien qu'il ait ralenti avant l'accident, avait tout de même percuté la voiture à bord de laquelle le garçon de 5 ans prenait place, à une vitesse estimée à 108 kilomètres à l'heure.

Ce policier participait alors à la filature d'un homme politique dans une situation qui ne présentait aucun danger de mort. Sa voiture était banalisée et ne possédait ni gyrophares ni sirène.

Le père de la victime avait amorcé un virage à gauche sur un feu vert, croyant qu'il avait assez de temps pour franchir l'intersection lorsque la voiture du policier, venant en sens inverse, l'avait embouti.

Une plainte a également été déposée dans ce cas-ci au bureau du Commissaire en déontologie. Bien que l'étude de cette plainte soit amorcée, le bureau du Commissaire ne prendra aucune mesure avant que les procédures criminelles ne soient terminées.

Si le DPCP ne porte pas d'accusations ou que le policier est exonéré à la suite d'accusations, le Comité de déontologie pourrait alors être appelé à se prononcer. Contrairement à la règle de droit criminel, qui exige une preuve hors de tout doute raisonnable, l'attribution d'un blâme et d'une sanction en déontologie repose sur le fardeau moins contraignant de la preuve prépondérante.