Le juge qui préside le tribunal d'appel qui doit examiner la condamnation aux États-Unis d'Omar Khadr pour crimes de guerre commet lui-même une infraction criminelle fédérale, car il est toujours avocat au sein d'un cabinet à New York, plaide la défense.

Dans une requête inusitée déposée cette semaine par écrit à la Cour d'appel du district de Columbia, les avocats de l'ancien prisonnier de Guantanamo Bay demandent que le juge William Pollard soit exclu de cette procédure. Ils citent à l'appui de leur requête deux lois fédérales américaines - dont l'une adoptée il y a 200 ans - qui prévoient que les avocats doivent cesser de pratiquer lorsqu'ils sont nommés juges.

Selon l'avocat nommé d'office par le Pentagone pour représenter Khadr, Sam Morison, le Torontois a droit à un tribunal composé de membres aptes à siéger, sans quoi la décision d'un tel tribunal pourrait être contestable.

Le juge Pollard, un associé dans un cabinet d'avocats de Wall Street, est l'un des deux civils nommés par la commission militaire pour présider l'appel du jugement de première instance. Me Pollard refuse de se récuser, et il a référé toute question au service des relations publiques de l'armée, qui n'a pas voulu commenter.

Mais dans des documents judiciaires, Me Pollard plaide qu'il agit dans cette affaire à titre de «fonctionnaire spécial» du département de la Défense, et qu'il peut ainsi être juge tout en demeurant avocat au privé.

Omar Khadr a plaidé coupable en octobre 2010, devant une commission militaire à Guantanamo Bay, aux cinq crimes de guerre dont il était accusé d'avoir commis en Afghanistan en juillet 2002, alors qu'il était âgé de 15 ans. Le Torontois a alors été condamné à huit années de prison supplémentaires, et a été transféré ensuite dans une prison canadienne, en Alberta. Il soutient depuis qu'il a plaidé coupable pour pouvoir être transféré au Canada.

Khadr, aujourd'hui âgé de 28 ans, a fait appel l'an dernier de sa condamnation; ses avocats plaident notamment que les gestes qui lui sont reprochés ne constituent pas des crimes de guerre au sens des lois américaines ou du droit international. La procédure d'appel est actuellement en suspens, le tribunal disant vouloir attendre l'issue d'un autre procès avant d'entendre la cause.