Un ancien homme de main du clan Cotroni de la mafia, arrivé au Québec il y a près de 50 ans, a été condamné jeudi à l'expulsion vers son Italie natale, pour des faits qui remontent à plus de 18 ans.

Michele Torre était visiblement sonné après son audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, à Montréal. Après si longtemps, il n'aurait pas cru que sa vie puisse basculer à ce point.

« Ils ont détruit ma vie aujourd'hui ! Commencer une autre vie dans un autre pays, tout seul, à 62 ans ! » s'est-il exclamé.

Père de trois enfants et grand-père de cinq petits-enfants, M. Torre a dit se sentir bien plus Canadien qu'Italien. Il dit ne connaître personne dans son pays natal. « Ça fait 47 ans que je suis au Canada, je suis arrivé à 14 ans. Toute ma vie, je l'ai vécue au Québec, à Montréal », a-t-il lancé avec les yeux pleins d'eau.

M. Torre est citoyen italien. Lorsqu'il est arrivé au pays, en 1967, ses parents n'ont pas pris la peine de faire les démarches pour lui obtenir la citoyenneté canadienne. Il ne l'a pas fait par lui-même non plus une fois adulte. Il est donc resté un simple résident permanent.

En 1996, il a été condamné à huit ans et neuf mois de prison pour un complot d'importation de 170 kilos de cocaïne. Il travaillait alors pour les dirigeants du clan Cotroni de la mafia montréalaise. M. Torre a prétendu qu'il n'était qu'un simple exécutant sans connaissance de la nature du produit importé. Le commissaire à l'immigration ne l'a pas cru.

« Il est inconcevable que les dirigeants du clan Cotroni aient envoyé une personne qui n'avait pas leur entière confiance pour récupérer 170 kilos de cocaïne à Toronto », a déclaré le commissaire Louis Dubé, en décrétant Torre interdit de territoire au Canada pour « grande criminalité » et « criminalité organisée ».

Possibilité d'appel

M. Torre avait aussi été arrêté en 2006 lors de l'opération antimafia Colisée. Il a été acquitté de toute accusation, mais le commissaire a souligné que le fardeau de la preuve est moins important en matière d'immigration et que les faits démontraient tout de même une proximité avec la mafia.

Michele Torre peut encore porter sa cause en appel devant la Cour fédérale. « Il y a matière à contestation », a assuré son avocat, Me Stéphane Handfield, après l'audience.

Me Handfield dit avoir eu pas moins de cinq clients d'origine italienne qui ont vu leur passé scruté à la loupe ces dernières années et qui se sont retrouvés passibles d'expulsion même s'ils ont passé toute leur vie adulte au Québec.

« Il y a une constance : ce sont tous des individus qui sont établis ici depuis de nombreuses années, dont la famille est au Canada, et qui sont visés pour de vieilles condamnations. », observe-t-il.