Une jeune serveuse d'un restaurant de Boucherville aurait été congédiée récemment après avoir appelé les policiers pour qu'ils arrêtent un client qui voulait quitter l'établissement avec sa voiture, alors qu'il était visiblement ivre.

Le 16 août dernier, les amies de Valérie Couturier, 23 ans, sont allées au restaurant Le Chêne blanc, où elle travaille, pour la rejoindre après son quart. Elle a alors remarqué qu'un client qui peinait à marcher se dirigeait vers sa voiture.

«Il marchait tout croche et n'était visiblement pas apte à conduire. Je lui ai dit qu'il ne pouvait pas partir avec sa voiture, et il m'a proposé que je le raccompagne. Puisque j'avais bu toute la soirée, je lui ai dit que je ne pouvais pas conduire à sa place et lui ai proposé d'appeler un taxi. C'est alors qu'il a pris ses clés et s'est dirigé droit vers sa voiture», raconte Mme Couturier.

Ne sachant pas comment empêcher l'homme de conduire, elle a décidé d'appeler les policiers pour qu'ils l'interceptent. À leur arrivée au restaurant, une autre cliente avait réussi à convaincre l'homme de lui remettre ses clés et son portefeuille.

Il a finalement été raccompagné chez lui par les policiers et n'a pas reçu d'avertissement ou de contravention.

Une semaine plus tard, la surprise 

Quelques jours plus tard, Valérie Couturier a été convoquée par le gérant du restaurant, qui lui a expliqué que le geste qu'elle avait fait était «inacceptable» et qu'il devait la congédier.

«Il me dit qu'il ne pouvait pas prendre le risque d'être poursuivi, que ce ne serait pas bon pour la réputation du restaurant. Il m'a répété à plusieurs reprises que ce que j'avais fait était inacceptable et que la seule option possible était de me congédier», raconte Mme Couturier, qui a écrit son histoire dans un billet publié sur le réseau social Facebook, abondamment partagé depuis.

Lorsque joint par La Presse, le propriétaire et gérant du restaurant Le Chêne blanc, Dave Baillargeon, a expliqué que la version des faits de son ancienne employée était véridique, mais qu'il manquait des détails pour bien comprendre ce qui avait motivé sa décision.

«On adore cette employée et je veux lui parler. Je pensais le faire ce matin, mais elle ne s'est pas présentée au rendez-vous. Elle m'a plutôt fait savoir qu'elle avait un avocat, mais on ne discute pas de la même manière avec un avocat», a expliqué M. Baillargeon.

En affaires depuis moins de deux ans, le propriétaire du restaurant a affirmé que cette histoire était un «important malentendu». Il a toutefois refusé d'expliquer à La Presse l'ensemble des éléments qui l'avait poussé à congédier Valérie Couturier, affirmant qu'il encourait actuellement «d'énormes risques de poursuite judiciaire».

Aucun recours possible

Atténuée et sans recours, Mme Couturier a décidé de faire appel à un ami de la famille, l'avocat Jules Brossard.

Elle a toutefois rapidement compris qu'il existait peu de recours pour se défendre dans ce genre de situation.

«Légalement, elle ne peut pas faire grand-chose. Je suis personnellement indigné de l'attitude de ses anciens patrons. On a pénalisé une personne qui a peut-être sauvé une vie, parce qu'un client du gars a peut-être fait des pressions et des menaces», a expliqué Me Brossard.

À la Commission des normes du travail, on a expliqué à La Presse qu'il n'existait aucun recours pour protéger des employés comme Mme Couturier dans ce genre de situation.

«Le recours qui concerne le congédiement sans cause suffisante n'est pas applicable dans son cas, puisqu'elle ne travaillait pas depuis deux ans pour le même employeur. Il n'y a rien pour la protéger», a expliqué le porte-parole de la Commission, Jean-François Pelchat.

Du côté du Service de police de la Ville de Longueuil, on a dit que l'homme était coopératif le soir du 16 août dernier et qu'il n'était pas anormal que des policiers raccompagnent des personnes jusqu'à leur domicile lorsque aucun acte illégal n'était commis.

Il était toutefois impossible de savoir si les policiers qui sont intervenus au restaurant Le Chêne blanc avaient vérifié si le conducteur avait été arrêté ou condamné par le passé pour conduite avec les facultés affaiblies.