Le Syndicat des agents correctionnels accueille avec scepticisme les conclusions de Service correctionnel du Canada (SCC), qui affirme que le piètre état des pénitenciers fédéraux pose un danger «important et imminent» pour la santé et la sécurité de leurs occupants.

La Presse a rapporté hier que le Plan de logement 2013-2018 du SCC tirait la sonnette d'alarme à ce sujet: «Le risque et les implications d'une défaillance grave de l'infrastructure physique, dangereuse pour la sécurité des personnes et des installations, les activités et la santé des occupants, sont importants et imminents», peut-on lire dans le document.

Ce constat a surpris le Syndicat des agents correctionnels du Canada, qui dit ne pas avoir reçu de copie du rapport daté de septembre dernier. «Ça semble exagéré, a réagi Jason Godin, deuxième vice-président national. Nous ne sommes pas du tout convaincus que les établissements ne peuvent pas gérer les délinquants de manière sécuritaire.»

Les craintes sont ailleurs

Le leader syndical a plutôt exprimé des craintes quant au projet d'agrandissement actuel des pénitenciers, qui selon lui n'est pas accompagné des programmes ou installations nécessaires pour répondre aux besoins de la population carcérale qui augmente.

La députée du Bloc québécois Maria Mourani a elle aussi émis des préoccupations au sujet du nombre de détenus. «Il n'y a pas de logique là-dedans, a-t-elle dit. Si tu décides d'augmenter ta population carcérale, tu dois mettre les ressources qui viennent avec. Si tu ne le fais pas, c'est que tu as une autre idée en tête. Cette idée, moi, je pense que c'est la privatisation. Comme aux États-Unis.»

À la demande du ministre de la Sécurité publique Vic Toews, la firme Deloitte&Touche a examiné certains modèles de privatisation des systèmes carcéraux à travers le monde, il y a quelques mois. Le ministre s'est dit peu convaincu par les conclusions de ce rapport et les avantages potentiels d'une privatisation à grande échelle.

Objectifs cachés?

Plusieurs experts à qui La Presse a parlé depuis hier ont quant à eux émis l'hypothèse que SCC évoque ces défaillances dans le but de justifier une éventuelle construction des supercomplexes carcéraux, tel que recommandé par un autre rapport externe en 2007.

Questionné sur ses intentions, le bureau du ministre Vic Toews a simplement répondu (en anglais seulement) que les mesures mises en place par le gouvernement pour durcir le ton face au crime avaient «gardé plus de criminels derrière les barreaux».

Dans une réponse aussi rédigée en anglais seulement, une porte-parole de SCC a indiqué que l'organisme avait adopté une série de mesures pour s'assurer de garder les usagers des pénitenciers en sécurité - sans préciser lesquelles. SCC n'a pas été en mesure de fournir des évaluations professionnelles sur lesquelles se seraient appuyées ses conclusions sur l'état de ses immeubles.

À noter qu'on pourrait en savoir davantage sur l'état des établissements carcéraux d'ici le printemps prochain; le vérificateur général enquête actuellement sur la question.

-Avec William Leclerc