Vivement critiquée pour avoir fait payer par le Trésor public des frais juridiques liés à une situation personnelle, la juge en chef du Tribunal adminitratif du Québec a démissionné hier en s'en prenant au ministre de la Justice.

Elle sera remplacée par un chef de cabinet de l'ex-ministre péquiste Paul Bégin.

Depuis un an, l'organisme dirigé par Hélène de Kovachich a versé 144 700$ à Luce Gayrard, avocate spécialisée en droit de la famille. La Presse a révélé la semaine dernière que ces dépenses étaient liées à un dossier personnel.

Depuis plusieurs semaines, Mme de Kovachich refusait d'ailleurs d'expliquer au ministre de la Justice à quoi avaient servi ces fonds.

Même si elle maintient que ces dépenses ont été effectuées en conformité avec les règles établies, Hélène de Kovachich écrit dans sa lettre de démission que la situation est devenue intenable.

«Le mandat donné à une avocate d'agir devant la Cour supérieure pour assister un membre du TAQ attaqué dans son rôle et ses fonctions a fait l'objet de rumeurs et de nombreux articles de journaux», a-t-elle écrit cette semaine dans sa lettre de démission.

«Devant la politisation et la médiatisation inhabituelle des décisions prises dans l'exercice de mes fonctions au TAQ, un tribunal indépendant, je n'avais d'autre choix que de me retirer.»

Mme de Kovachich, proche des cercles libéraux, tient les rênes de l'organisme depuis 2008. Son mandat avait été renouvelé juste avant l'élection de septembre dernier. Il venait à échéance un an plus tard.

C'est Mathieu Proulx, vice-président du TAQ, qui prendra la relève d'Hélène de Kovachich. L'avocat de profession avait été chef de cabinet du ministre de la Justice Paul Bégin à la fin des années 90.

La Presse a appris que vendredi dernier, des vice-présidents du TAQ ont rencontré la sous-ministre à la Justice en l'absence de la juge en chef.

Après cette rencontre, celui qui devait succéder à Hélène de Kovachich en cas de pépin, Louis Cormier, a perdu cette responsabilité au profit de M. Proulx. M. Cormier était considéré comme trop près de la démissionnaire.

Saint-Arnaud blâmé

Dans sa lettre de démission, Hélène de Kovachich désigne surtout le ministre de la Justice.

Elle l'accuse de ne pas avoir «balisé tant ses interventions publiques que l'exercice de ses responsabilités» «malgré des ordonnances» de la Cour supérieure qui interdisent la divulgation de la nature du dossier juridique au centre de l'affaire.

Selon elle, Bertrand Saint-Arnaud aurait dû respecter un devoir de réserve et ne pas «participer» au débat.

«La situation a malheureusement évolué autrement, a compromis le respect des institutions et rendu impossible l'exercice normal de mes fonctions de présidente», a-t-elle écrit.

Mme de Kovachich ne quitte pas le Tribunal administratif du Québec. Elle y restera comme simple juge.

Son mandat à la tête de l'organisme a été marqué par des relations extrêmement difficiles avec les juges administratifs. Sa lettre de démission se conclut d'ailleurs par des salutations à ceux, parmi ses collègues, «qui ont fait preuve de loyauté, de dévouement et de rigueur.»