Un duel de poursuites en diffamation est en cours entre l’acteur Jasmin Roy et un homme qui l’accuse d’agression sexuelle, Jean-François Robillard. L’affaire a pris racine dans la foulée du mouvement #metoo, en 2020. Elle remonte à une soirée dans un bar d’Abitibi-Témiscamingue, 20 ans plus tôt.

L’acteur et animateur Jasmin Roy est poursuivi pour 500 000 $ par un homme qui l’accuse d’agression sexuelle et de diffamation. Mais l’affaire remonte à plus longtemps.

Jasmin Roy menaçait depuis quelques années de poursuivre Jean-François Robillard pour diffamation, car ce dernier l’avait dénoncé publiquement sur les réseaux sociaux. Jasmin Roy souhaitait entamer ces démarches judiciaires sous le couvert de l’anonymat pour préserver sa réputation, ce qui lui a été refusé en Cour suprême le 25 mai dernier.

Depuis, il affirme être lui-même victime de harcèlement de la part de M. Robillard.

Selon les faits allégués, tout aurait débuté quand Jasmin Roy et Jean-François Robillard se trouvaient dans un bar de Rouyn-Noranda en 2001. Au comptoir, Jasmin Roy aurait sucé l’oreille de M. Robillard jusqu’à lui enlever sa boucle d’oreille avec sa langue, peut-on lire dans les documents judiciaires de la poursuite intentée par M. Robillard vendredi.

Un peu plus tard, l’acteur aurait rejoint M. Robillard aux toilettes. Tout en l’empêchant de sortir de sa cabine, il se serait masturbé devant lui et lui aurait éjaculé dessus.

M. Robillard a figé et s’est senti paralysé, peut-on lire. Dans les années suivantes, il va abandonner des études pour devenir policier, car elle « remet alors en question sa capacité à bien réagir sous le stress et ses habiletés à devenir un bon policier ». D’autres études en sciences humaines seront aussi délaissées en raison d’une anxiété envahissante.

L’homme complétera finalement une technique de travail social en 2010 et décrochera un emploi d’intervenant.

Encore aujourd’hui, il affirme avoir « des attaques de panique quotidiennes, des crises d’angoisse ainsi que de l’insomnie ». M. Robillard a aussi reçu un diagnostic de stress post-traumatique résultant de l’agression, selon le document judiciaire.

Dis son nom

C’est dans la foulée du mouvement #metoo que M. Robillard a réalisé tous les impacts qu’avait eus l’agression sexuelle sur sa vie, affirme-t-il. En juillet 2020, il fait une déclaration sur les réseaux sociaux pour la dénoncer publiquement Jasmin Roy.

En août de la même année, il a reçu une mise en demeure de l’acteur. Il a alors retiré sa déclaration des réseaux sociaux.

En septembre 2020, Jean-François Robillard a décidé à aller porter plainte à la police pour l’agression sexuelle subie. Une enquête policière a été déclenchée par la Sûreté du Québec, étant donné que les faits allégués s’étaient produits en Abitibi-Témiscamingue.

Sept mois plus tard, Jean-François Robillard a appris qu’en raison de l’insuffisance de la preuve, aucune accusation ne pouvait être déposée contre son agresseur. M. Robillard a alors choisi de revenir vers les réseaux sociaux où il a à nouveau parlé de l’agression sexuelle.

Demande d’anonymat

À partir d’avril 2021, Jasmin Roy et sa fondation contre l’intimidation ont fait une demande d’anonymat en Cour pour pouvoir poursuivre M. Robillard et le groupe Dis son nom en diffamation.

Cette demande a finalement été rejetée le 25 mai dernier. « La décision rendue par la Cour suprême, soit de ne pas me permettre de conserver mon anonymat, m’oblige à faire une sortie médiatique pour nier vigoureusement les allégations de M. Robillard », a réagi Jasmin Roy par communiqué à la suite de cette décision.

L’acteur affirme au contraire être lui-même victime de harcèlement de la part de M. Robillard et avoir porté plainte au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). Selon Jasmin Roy, M. Robillard aurait notamment tenté à plusieurs reprises d’entrer dans un immeuble où il a un logement. Il aurait aussi été menaçant avec un proche d’un employé de la Fondation Jasmin Roy Sophie Desmarais.

Selon Jean-François Robillard, ces faits sont soit inexacts, soit biaisés, peut-on lire dans les documents judiciaires. C’est pourquoi il poursuit M. Roy en diffamation — en plus d’agression sexuelle. Il demande un total de 500 000 $.

« La demande de M. Roy d’agir de manière anonyme a été rejetée tant à la Cour supérieure, qu’à la Cour d’appel que par la Cour suprême du Canada. Réagir à cette défaite en menant une campagne publique de salissage contre notre client n’est pas digne d’une personne à la tête d’une fondation qui lutte contre l’intimidation », a réagi vendredi soir par communiqué l’avocate de M. Robillard, MVirginie Dufresne-Lemire.

Jasmin Roy a répliqué le même soir en affirmant qu’il allait intenter une action en diffamation contre Jean-François Robillard, les administratrices du groupe Dis son nom sur les réseaux sociaux et MDufresne-Lemire.