« Je ne voulais vraiment pas, mais je ne disais rien, car c’est quelqu’un qui avait beaucoup d’autorité » : un jeune adulte s’est remémoré les gestes troublants qu’aurait posés Thierry Karsenti, ex-chercheur à l’Université de Montréal accusé de contacts sexuels sur un mineur. L’homme dans la cinquantaine lui a caressé les parties génitales à une dizaine de reprises, plongeant chaque fois la victime alors âgée de 11 ans dans un profond malaise, selon son témoignage lundi à Longueuil.

Les attouchements ont débuté en 2015 à l’extérieur de la province et se sont poursuivis régulièrement sur une période d’un an et demi à Brossard, selon le plaignant.

Thierry Karsenti, universitaire en éducation numérique, avait été arrêté en février 2021. Il n’est désormais plus à l’emploi de l’Université de Montréal.

L’accusé, un éminent chercheur, était titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les technologies de l’information et de la communication en éducation. Il a aussi été professeur au département de psychopédagogie et d’andragogie et occupait le siège de directeur du Centre de recherche interuniversitaire sur la formation et la profession enseignante.

Thierry Karsenti aurait profité de moments où il se trouvait seul avec la victime pour commettre les gestes qui lui sont reprochés. Chaque fois, l’homme de 54 ans aurait demandé au garçon de 11 ans de se coucher sur le ventre pour lui flatter les fesses. Il aurait aussi glissé sa main dans les pantalons de la victime pour lui caresser les parties génitales.

« Ça durait une dizaine de minutes. Moi, j’étais un peu mal à l’aise. C’était pas un bon moment », a décrit la victime, dont l’identité est protégée par une ordonnance de non-publication.

Ces attouchements sont survenus une dizaine de fois, a précisé le jeune homme aujourd’hui âgé de 18 ans avec calme et éloquence devant la juge Anne-Marie Beauchemin.

Chaque fois, l’accusé dans la cinquantaine serait sorti de la pièce où il se trouvait comme si de rien n’était. Il posait à la victime des questions banales « pour normaliser un comportement », a relevé la procureure de la Couronne MAnne Gauvin lors de son interrogatoire.

L’accusé se serait même introduit dans une salle de bains alors que la victime prenait sa douche. Il aurait ensuite tiré le rideau de la douche pour observer ses parties génitales. « J’avais barré la porte. Il avait forcé la porte et était rentré pour venir me parler. »

Le moment aurait duré deux ou trois minutes et a plongé la victime dans un profond malaise. « Je ne me sentais pas très à l’aise. Je me suis tourné pour me cacher », a expliqué le jeune adulte.

Éclaircir le flou

Le plaignant a tout raconté à sa mère en septembre 2019. « Je ne voulais pas lui mentir, alors je lui ai avoué ce qui s’est passé. » Il a décidé de porter plainte le mois suivant.

Ses souvenirs étaient alors plutôt flous. C’est en discutant avec sa mère qu’il est parvenu à se remémorer les détails des agressions, a-t-il expliqué à la juge Beauchemin.

Il a longtemps tenté d’oublier ces attouchements, a affirmé le jeune homme. Il n’en a parlé à personne.

J’avais honte. Je suis quand même gêné avec les adultes. Je garde beaucoup de choses pour moi. Ce n’était pas quelque chose d’agréable.

Victime de Thierry Karsenti

« Si personne n’était venu m’en parler, je ne l’aurais dit à personne », a ajouté la victime.

MClara Daviault, qui défend l’accusé, a questionné la victime sur quelques divergences entre le récit livré en salle d’audience lundi matin et sa déclaration à la police à l’époque de la plainte présentée en preuve peu après.

« C’était flou dans ma tête », a répondu la victime.

MDaviault a aussi demandé à la victime une description détaillée des attouchements dans son contre-interrogatoire. Le jeune homme a été questionné sur l’ordre dans lequel les différents gestes à caractère sexuel seraient survenus. « Je me rappelle que j’étais sur le dos [quand il a commencé] », a expliqué la victime.

Le procès entamé lundi au palais de justice de Longueuil se poursuit jusqu’à mercredi.