(Longueuil) Le procès d’un policier qui est accusé d’avoir agressé sexuellement une citoyenne alors qu’il était en service s’est ouvert lundi. « J’avais confiance. Je sais que les policiers représentent la loi, ils sont là pour nous protéger, ils sont intègres, donc je n’avais pas peur de lui », a raconté la victime.

L’étudiante a relaté avoir rencontré le policier Yannick Dauphinais le 20 juillet 2021 à une station-service de La Prairie. L’agent de la Régie intermunicipale de police Roussillon lui aurait adressé la parole et lui aurait proposé de la suivre à bord de son autopatrouille jusqu’au IGA où elle se rendait, quelques mètres plus loin.

À cet endroit, le policier alors âgé de 41 ans lui aurait demandé son numéro de téléphone. « Lorsqu’on me demande mon numéro de téléphone, peu importe les circonstances, j’ai pris l’habitude de le donner parce que j’ai eu de mauvaises expériences par le passé. Je le donne et après, je décide si je fais suite ou non aux échanges », a expliqué la femme qu’on ne peut pas identifier en raison d’une ordonnance de la cour.

« Mais j’avais confiance parce que c’était un policier », a ajouté celle qui avait 28 ans à l’époque.

Le lendemain matin, le policier l’aurait textée pour savoir s’il pouvait passer la voir « deux minutes » avant qu’elle se rende à son travail. La jeune femme a accepté, mais elle espérait discuter avec lui à l’extérieur de sa maison. Le policier, qui était encore en service, serait toutefois entré à l’intérieur de son domicile.

Au moment de repartir, il aurait saisi le visage de la victime avec ses mains et l’aurait embrassée sur la bouche sans préavis.

« Il faisait face à la porte d’entrée. Il s’est tourné vers moi pendant que je mettais mes sandales. Quand il s’est approché, j’ai eu l’impression qu’il allait me faire la bise parce que je ne le connaissais pas. Je venais juste de le connaître la veille », a-t-elle expliqué au palais de justice de Longueuil.

L’homme l’aurait ensuite attirée vers le salon. Il aurait continué à l’embrasser et lui aurait touché les fesses et les seins. À un certain moment, il aurait pris la main de la femme pour la mettre sur son pénis par-dessus son uniforme de travail. La victime affirme qu’elle a figé et que, pendant tout ce temps, elle lui a répété qu’elle devait partir pour ne pas être en retard à son travail.

Le policier lui aurait ensuite proposé de monter à l’étage vers la chambre à coucher, mais elle aurait fait croire qu’elle avait ses règles. « Je me souviens exactement des mots. Il m’a ensuite demandé s’il pouvait avoir une gâterie », a enchaîné la femme. « Et il m’a demandé si c’est correct si je la sors [en parlant de son pénis] », a-t-elle dit.

La victime a dit qu’elle craignait la réaction de l’homme et qu’elle voulait que les attouchements se finissent au plus vite. Dans le contexte, elle a opté pour le « moins pire » des scénarios. Elle l’a masturbé environ deux minutes jusqu’à ce qu’il éjacule.

L’homme s’est lavé les mains et s’est dirigé vers la porte. Avant de partir, il a suggéré qu’il pourrait répéter l’expérience le lendemain matin.

Troublée, la victime s’est confiée à un ami le jour même. Le lendemain, elle en a aussi parlé à son patron. Celui-ci l’a encouragée à porter plainte. Il lui a payé un taxi pour qu’elle se rende au poste de police le plus près, à Montréal. L’enquête a alors été confiée au Bureau des enquêtes indépendantes.

À la fin de son témoignage, la victime a affirmé avoir songé à abandonner le processus judiciaire tellement elle était stressée. Elle a dit avoir peur des représailles et toujours souffrir de problèmes de sommeil, un an et demi après sa rencontre avec Yannick Dauphinais.

« Par respect pour moi-même, je me suis dit que ça serait mieux que je le fasse jusqu’au bout [le processus], que je ne me suis pas rendue ici pour arrêter », a-t-elle dit d’une voix entrecoupée de sanglots.

Deux témoins civils, un enquêteur de scène de crime et un biologiste judiciaire, doivent à leur tour témoigner cette semaine. Le procès criminel se tient devant le juge Bertrand St-Arnaud. Il doit durer cinq jours.