La condamnation à 25 ans de pénitencier de Jonathan Massari pour les meurtres de quatre hommes reliés à la mafia a été marquée par les témoignages émouvants de membres des familles des victimes lundi matin à Montréal.

Massari, 41 ans, a plaidé coupable il y a deux semaines d’avoir comploté les assassinats de Lorenzo Giordano, Rocco Sollecito et des frères Vincenzo et Giuseppe Falduto, commis en 2016 dans le cadre d’une guerre de pouvoir entre clans calabrais et sicilien de la mafia montréalaise, avait indiqué la Sûreté du Québec.

« Lorenzo a été tué de façon barbare et sans défense. Comment une personne peut-elle avoir si peu de considération pour la vie humaine ? Ces années, nous les avons vécues dans un état d’esprit dévasté par la douleur lancinante qui ne cesse pas et qui ne diminuera jamais », a écrit un membre de la famille Giordano.

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Lorenzo Giordano était considéré par la police comme un lieutenant du clan Rizzuto de la mafia montréalaise.

« Spirituellement, il [Massari] a détruit ma foi en Dieu », a pour sa part écrit un membre de la famille Falduto.

« Que leur est-il arrivé ? Ont-ils souffert ? Giuseppe et Vincenzo ont été brutalement emmenés, et même pas un cimetière à visiter. Comment expliquer un jour à nos enfants ce qui s’est réellement passé ? Il n’y a aucun moyen de leur cacher la vérité, car internet est à portée de main », a renchéri un autre membre de la famille de Vincenzo et Giuseppe Falduto, dont les corps ont été brûlés et n’ont jamais été retrouvés.

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Giuseppe et Vincenzo Falduto

« Pour Jonathan, ils étaient son prochain chèque de paye. Pour nous, il nous a détruits mentalement et émotionnellement et aucun mot ne peut résumer les dommages avec lesquels nous vivons tous les jours et pour le reste de nos vies », a-t-il conclu.

« Je vous remercie d’avoir partagé avec la Cour les choses difficiles que vous avez vécues et votre douleur à la suite d’évènements qui ne sont pas ordinaires. Des crimes comme ceux-ci ont des conséquences qui durent et perdurent », a réagi le juge Michel Pennou, de la Cour supérieure.

En condamnant Massari à 25 ans, le magistrat s’est rendu à une suggestion commune de la poursuite et de la défense.

En soustrayant le temps passé en détention préventive, il reste à Massari un peu moins de 20 ans d’emprisonnement à purger, et au moins la moitié de cette peine devra s’être écoulée avant qu’il soit admissible à une libération conditionnelle.

Témoignage risqué

Trois des quatre victimes ont été assassinées par un ancien tueur à gages du crime organisé qui a ensuite collaboré avec la police et enregistré ses anciens complices à leur insu durant l’été 2019.

La preuve reposait en grande partie sur le témoignage de cet ex-tueur à gages devenu agent civil d’infiltration (ACI).

Rappelons que Massari avait commencé à subir un premier procès devant jury l’automne dernier, mais celui-ci a avorté parce que ce témoin avait fait de nombreuses déclarations non admissibles en cour et préjudiciables pour l’accusé.

Devant les risques que comportait la tenue d’un nouveau procès et d’un autre témoignage du tueur à gages, les procureurs de la poursuite et les avocats de la défense ont amorcé des négociations et en sont venus à une entente à la suite de séances de facilitation devant la juge à la retraite Johanne St-Gelais.

« On est dans un dossier où la preuve reposait sur un témoin principal particulier et problématique. M. Massari n’a jamais voulu esquiver sa responsabilité. Dans un procès, il aurait pu donner sa version des faits et rectifier des éléments de la preuve qui n’étaient pas exacts. Il aurait répudié une bonne partie du témoignage de l’ACI, un témoin taré qui éprouvait une haine intense envers M. Massari », a déclaré Me Véronique Robert, qui, avec MPhilippe Larochelle, défendait le condamné.

« M. Massari n’est pas l’auteur principal. Il n’a pas appuyé sur la détente, car il en est incapable. Je ne le dis pas pour diminuer sa responsabilité, mais pour expliquer son plaidoyer, qui est en harmonie avec sa responsabilité morale », a-t-elle ajouté.

« J’aimerais dire à la Cour et aux familles des victimes que j’avais de mauvaises fréquentations à l’époque, qui m’ont amené à faire des choses que je regrette. Je m’excuse auprès de ceux que j’ai blessés », a pour sa part déclaré Jonathan Massari avant de prendre le chemin du pénitencier.

La poursuite était représentée par MMarie-Christine Godbout, MIsabelle Poulin, MKarine Cordeau et MCatherine Sheitoyan, du Bureau de la grande criminalité et des affaires spéciales.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.