Deux policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) ont menti aux enquêteurs chargés de faire la lumière sur la mort d’un détenu, survenue dans une cellule en 2017.

C’est la décision qui vient d’être rendue par le Comité de déontologie policière, cinq ans après la mort de David Tshiteya Kalubi, âgé de 23 ans.

Le sergent-détective Dominic Gagné et l’agent Mathieu Paré avaient noté dans leurs registres que M. Kalubi affirmait ne souffrir d’aucun problème de santé lors de son arrivée au poste de police. Ils ont servi la même version au Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), chargé d’enquêter sur la mort.

Les deux hommes oubliaient toutefois que la procédure de réception était filmée : l’extrait vidéo confirme que M. Kalubi avait mentionné à trois reprises qu’il souffrait d’anémie falciforme, une maladie sévère du sang qui affecte disproportionnellement les personnes noires. Il avait aussi indiqué prendre des médicaments – qu’il n’avait pas avec lui.

Le sergent-détective Gagné et l’agent Paré « ont présenté une déclaration qu’ils savaient fausse et inexacte au BEI qui tentait d’éclaircir les circonstances du décès de monsieur Kalubi à la suite de leur intervention à son endroit », a tranché le Comité de déontologie policière. « La faute est grave et caractérisée. »

Les explications de M. Gagné « ne sont pas crédibles », a décidé le comité, évoquant « une gymnastique justificative décousue et invraisemblable ». Les justifications de M. Paré n’ont pas non plus été retenues.

M. Kalubi est mort le lendemain de son arrestation dans une cellule de la Cour municipale de Montréal. L’autopsie a attribué sa mort à « une arythmie cardiaque secondaire à une cardiomégalie d’étiologie multifactorielle ». Le décès n’aurait pas de lien avec sa maladie.

C’est lors d’une rencontre avec les enquêteurs du BEI que les policiers ont été confondus. L’extrait de vidéosurveillance leur a été montré pour la première fois. Les deux policiers ont rapidement quitté la rencontre avec les enquêteurs.

Ils devraient être convoqués à nouveau devant le Comité de déontologie policière afin de déterminer la sanction qui leur sera imposée.

« Nous sommes sensibles à la situation dont il est question dans cette décision et allons suivre ce dossier avec attention », a indiqué le SPVM dans un courriel, soulignant que les policiers pouvaient encore faire appel. « Nous allons prendre le temps d’analyser le jugement et laisser le processus judiciaire suivre son cours. »

L’avocat des deux policiers n’a pas immédiatement rappelé La Presse.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) avait déjà annoncé, en avril 2019, qu’il ne comptait pas porter d’accusations contre les deux policiers suite à l’enquête du BEI. Celle-ci « ne permet pas de conclure que les policiers impliqués ont fait preuve de négligence criminelle », indiquait le DPCP dans un communiqué.

La conduite des policiers « ne peut avoir concouru au décès », ajoutait le DPCP. « Le médecin traitant de l’homme a indiqué que le fait de ne pas prendre les médicaments mentionnés par ce dernier aux policiers lors de la procédure d’écrou n’a aucune incidence et ne peut avoir contribué au décès. »