(Québec) Au septième jour du procès pour agression sexuelle de l’ex-député Harold LeBel, les avocats de la défense et de la poursuite ont chacun fait une ultime tentative pour convaincre le jury au palais de justice de Rimouski.

« J’estime que le témoignage de la plaignante est invraisemblable, le cumul des invraisemblances est trop grand », a résumé dans sa plaidoirie MMaxime Roy, qui représente l’ancien élu du Parti québécois.

Selon lui, le récit fait par la plaignante de cette soirée d’octobre 2017 durant laquelle M. LeBel aurait tenté de l’embrasser, de défaire son soutien-gorge et lui aurait caressé les fesses tandis qu’elle était couchée, tétanisée, sur un lit, est émaillé d’incongruités.

MRoy s’étonne que son client ait réussi « du premier coup, à une main, à dégrafer son soutien-gorge ». Ou encore que la plaignante, qu’une ordonnance de la cour interdit de nommer, soit allée se coucher après cet épisode sans se soucier « du sort de son amie qui dort à côté ».

« Alors qu’elle tremble de peur, quelques minutes seulement après elle décide de se déshabiller et prendre sa douche » dans la salle de bain verrouillée, a relaté MRoy aux membres du jury. « Comment peut-on être plus vulnérable que nu dans une douche ? »

« Il est où, le texto ? »

C’est à ce moment de la soirée que la plaignante raconte avoir écrit à son amie et collègue qui dormait dans le même appartement. « Posez-vous la question : il est où, le texto ? Pourquoi elle ne l’a pas conservé ? Êtes-vous convaincus par son explication ? », a demandé l’avocat de la défense.

La plaignante a raconté qu’elle n’était jamais parvenue à retrouver ce message dans son téléphone, qui disait en substance : « WTF, Harold est bizarre. » Elle a expliqué qu’elle le croyait disparu parmi ses iMessages puisqu’elle avait beaucoup échangé avec son amie dans les dernières années et que ce texto aurait été effacé par le système.

La jeune femme a toutefois conservé un échange de courriels de février 2020 avec l’accusé, dans lequel il lui demande pardon, ne nie pas ce qu’elle lui reproche et écrit : « Je n’ai aucun souvenir de tout ça. »

« C’est une réponse qui a été faite rapidement, de manière précipitée, a tenté d’expliquer MRoy. Il est tombé en bas de sa chaise et a maladroitement, plutôt que la confronter, essayé de recoller les pots cassés. »

La Couronne a sans surprise insisté sur ces courriels d’Harold LeBel. « Vous, est-ce que vous vous excusez pour des choses que vous n’avez pas faites ? Est-ce que vous regrettez des gestes que vous n’avez pas posés ? », a demandé la procureure de la Couronne, MManon Gaudreault.

Elle a rappelé au jury que celui qui était député au moment des faits allégués a dit aux policiers « avoir eu un black-out durant la nuit », ou encore qu’il ne se souvenait pas vraiment de ce qui s’était passé.

Pas que les psychopathes

Devant le tribunal, Harold LeBel a plutôt dit qu’il avait la certitude d’avoir dormi cette nuit-là, qu’il n’avait pas touché la plaignante, mais qu’il s’était réveillé avec les mains sur elle au hasard du sommeil.

Maxime Roy a rappelé les textos échangés le lendemain. M. LeBel avait tenu à écrire à la plaignante en matinée. « Pendant plus de cinq heures, il lui caresse les fesses et l’anus, et le lendemain matin lui écrit : “Merci de m’avoir laissé te coller”, a lancé MRoy. Qui ferait ça ? C’est un psychopathe qui ferait ça. »

« Je vous le dis tout de suite, ce ne sont pas que les psychopathes qui commettent des agressions sexuelles », a rétorqué la procureure de la Couronne dans sa plaidoirie.

« Regardez l’ensemble de la preuve […] Vous ne pourrez pas voir autre chose qu’une agression sexuelle », a conclu MGaudreault.

Les plaidoiries terminées, le juge entend donner ses directives aux jurés lundi. Le jury composé de 14 citoyens – 10 femmes et 4 hommes – sera ramené à 12. Le juge Serge Francœur, de la Cour supérieure, avait choisi d’en nommer deux de plus par précaution. Plusieurs jurys avaient été frappés par la pandémie de COVID-19 dans les dernières années.

Après avoir reçu ses directives, le jury devrait délibérer dès lundi afin de rendre un verdict unanime.