Yolanda* veut que son fils survive. Mardi, un juge de la Cour supérieure a pourtant ordonné que son petit garçon de 5 ans soit extubé après plus de quatre mois passés dans le coma. La mère qui a failli perdre son fils dans une noyade s’est confiée à La Presse.

« Tout ce que je souhaite, c’est que mon enfant revienne à la maison, et ce, peu importe la gravité de son état », dit la femme qui ne se laisse pas envahir par les émotions.

Le 12 juin dernier, Yolanda est sortie faire une course avec son mari. Ses trois enfants sont alors restés sous la supervision de leur grand-mère, qui ne sait pas nager. « Quand on est rentrés, on a découvert ma mère inconsciente dans la piscine. Mon mari l’a sortie, lui a fait des manœuvres. Quand elle s’est réanimée, elle nous a dit qu’elle cherchait mon enfant sous l’eau », raconte-t-elle. L’eau de la piscine était brune et opaque.

On a appelé le 911 et j’ai crié “au secours, au secours” pour que le voisinage vienne nous aider.

Yolanda

L’enfant est resté sous l’eau de 15 à 20 minutes, selon la décision de la Cour supérieure rendue mardi. Des manœuvres ont été pratiquées pendant une soixantaine de minutes avant que le rythme cardiaque du garçon ne reprenne.

Depuis son arrivée à l’hôpital Sainte-Justine, l’enfant est « ventilo-assisté » au moyen d’un tube introduit dans sa trachée. Il est nourri par gavage. Son cerveau est « sévèrement » atteint.

Des signes laissent toutefois croire que l’enfant pourrait respirer de manière autonome. Le personnel médical veut donc retirer le tube endotrachéal, qui est contre-indiqué dans la situation du garçon. Le tube pourrait entraîner des dommages « sérieux, voire fatals », disent les médecins.

Yolanda n’est pas contre l’extubation. Elle veut toutefois que son fils soit réintubé s’il peine à respirer. Sainte-Justine se prive en fait d’informations permettant d’ajuster le tir et de maximiser les chances d’une extubation subséquente, a fait valoir son avocat MPatrick Martin-Ménard, en cour.

« J’aimerais qu’après l’extubation, on fasse tout pour maximiser la survie de mon fils. Je ne veux pas qu’on se contente de l’extuber et que, si ça ne marche pas, on lui donne des soins de fin de vie », explique-t-elle calmement au téléphone.

« Je ne veux pas qu’on limite les soins dont mon fils pourrait avoir besoin. Regarder un enfant qui n’arrive pas à gérer ses sécrétions, qui suffoque, si vous ne l’intubez pas, ce n’est pas beau à voir. C’est purement un crime », laisse-t-elle tomber.

144 jours à l’hôpital

Yolanda compte les jours depuis que son fils est hospitalisé (elle est rendue à 144) et elle se rend à son chevet quotidiennement. Avant la quasi-noyade, son fils l’appelait « mommy-chérie-doudou-amour ». Elle lui répondait en le surnommant « chouchou ».

« On dit qu’il va être très endommagé, qu’il va avoir beaucoup de handicaps. Mais nous, en tant que parents, on est prêts à l’accueillir avec ces handicaps. On va toujours chérir notre enfant, on va toujours l’aimer. Il est notre fils », dit la mère de famille.

En cour, le personnel médical du CHU Sainte-Justine a soutenu que la réintubation (si l’extubation échoue) entraînerait des risques de pneumonie, d’inflammation de la trachée, de complications infectieuses et de déconditionnement musculaire.

Le juge Bernard Jolin a donc tranché mardi en faveur de l’extubation pour « le meilleur intérêt de l’enfant ».

« [L’] objectif [des parents] consiste à maintenir [l’enfant] intubé aussi longtemps que possible pour permettre l’accomplissement d’un miracle », a d’ailleurs écrit le juge dans sa décision.

C’est que Yolanda et son mari, des protestants, croient aux miracles et à l’intervention de Dieu. Le père de l’enfant « ressent que [son fils] sera le premier cas à vivre un rétablissement complet et qu’il pourra retourner à son état de base », indique un document déposé en preuve par la défense.

Yolanda parle en effet de sa foi comme d’une « boussole ». « En son temps, Dieu agira. En son temps, il accomplira son œuvre dans la vie de mon fils. J’y crois fermement », dit-elle même si on ne l’a pas interrogée sur sa religion.

La famille a jusqu’à lundi pour porter sa cause en appel. Le CHU Sainte-Justine a confirmé qu’il n’extubera pas l’enfant tant que ce délai ne sera pas dépassé.

* Nom fictif afin de protéger l’identité de l’enfant

Lisez « Un enfant sera extubé sur ordre de la Cour »