Le caïd Raynald Desjardins, qui purge depuis 2016 une peine de 14 ans de pénitencier pour avoir comploté le meurtre d’un aspirant parrain de la mafia, sera de nouveau libéré dans les prochains jours, sous fortes conditions.

Même si la Commission des libérations conditionnelles du Canada considère que le niveau d’intervention auprès de Desjardins demeure « élevé », elle doit le libérer au deux tiers de sa peine.

Condamné dans la foulée du meurtre de l’aspirant-parrain Salvatore Montagna commis à Charlemagne en novembre 2011, Raynald Desjardins, 68 ans, avait obtenu une première libération conditionnelle en avril 2021, mais celle-ci été révoquée cinq mois plus tard, car le caïd avait été vu par les policiers accompagné d’un individu qui semblait agir comme son garde du corps et qui avait des antécédents criminels.

Raynald Desjardins, qui dit être à la retraite du monde criminel, avait donné sa version des faits aux commissaires, mais ceux-ci avaient soulevé des « incongruités » et déploré un « manque d’honnêteté et de transparence ».

« Depuis votre retour au pénitencier en septembre 2021, vos comportements n’ont posé aucun problème particulier. Votre équipe de gestion des cas mentionne que la population carcérale semble vous porter respect alors que vous possédez un entourage prêt à vous rendre divers services », note, entre autres, un commissaire dans sa décision de cinq pages dévoilée lundi.

Parce que les risques de récidive sont présents avant l’expiration de la peine, le commissaire interdit à Desjardins tout contact avec des individus impliqués dans une organisation criminelle ou dans le trafic de stupéfiants, lui interdit de fréquenter les établissements licenciés connus pour être associés au crime organisé, lui interdit de communiquer avec la famille de Montagna, l’oblige à divulguer toutes ses transactions financières à son agent de libération et le contraint à ne posséder qu’un seul téléphone cellulaire et une seule carte SIM.

À ce sujet, Desjardins devra fournir à ses surveillants, sur demande, son registre d’appels, ses messages vocaux, ses textos, ses accès à internet et tout autre renseignement qui pourrait lui être demandé relativement à son appareil qui, de plus, ne pourra être muni d’un système de communications cryptées.

Fait à noter, l’agent de libération a demandé à ce qu’une condition spéciale oblige Desjardins à l’aviser de tous ses déplacements, de l’occupation de son temps et des personnes qui seront présentes lors de ses activités, à l’avance, par écrit, et qu’il obtienne une autorisation verbale avant de modifier son agenda, mais la Commission a refusé, évaluant que cette demande n’était pas raisonnable et nécessaire.

Sur les dents

Les milieux criminels et policiers sont sur les dents et appréhendent la sortie de Raynald Desjardins, qui a été au cœur de guerres intestines et de pouvoir qui ont ébranlé la mafia montréalaise depuis 2005.

Lors de sa courte période de libération en 2021, les policiers ont découvert en possession de son garde du corps une liste de plaques d’immatriculation et des descriptions de véhicules, dont celui de Stefano Sollecito, considéré comme l’un des chefs de la branche sicilienne de la mafia montréalaise.

Il y a actuellement des tensions au sein du crime organisé montréalais ; des véhicules qui flambent, des restaurants qui sont les cibles de méfaits, et nos sources policières croient que la libération de Desjardins pourrait déboucher sur de nouvelles alliances dans le milieu criminel.

Autrefois très proche du défunt parrain Vito Rizzuto, Raynald Desjardins a été condamné à de longues peines durant les années 80 et 90 pour d’importantes importations de stupéfiants qui ont échoué.

Il a reproché aux Siciliens de ne pas s’être occupés de lui après sa condamnation, durant les années 90. En 2005, lorsque l’un de ses amis, Giovanni Bertolo a été tué, Desjardins en aurait voulu à Francesco Arcadi, qui avait pris du galon après que Vito Rizzuto eut été extradé aux États-Unis pour les meurtres de trois capitaines rebelles du clan Bonanno commis en 1981.

Selon la théorie de la police, les clans de Desjardins et de Montagna ont pris part à un putsch contre les Rizzuto en 2009-2010, mais un conflit aurait éclaté entre eux, débouchant sur le meurtre de Montagna en 2011.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.