Le producteur québécois Luc Wiseman a renoncé jeudi à son enquête préliminaire, décidant plutôt de plaider coupable à une accusation d’attouchements sexuels sur une mineure. Il demeurera détenu d’ici à ce que sa peine soit prononcée.

C’est donc dire que cette étape, qui devait initialement durer deux jours au palais de justice de Montréal et durant laquelle des éléments de preuve devaient être présentés, n’aura pas lieu.

En plaidant coupable, Luc Wiseman a interrompu ce processus judiciaire. La plaignante et les autres témoins n’ont donc pas eu à témoigner. En salle d’audience, le juge Pierre Labelle a indiqué au producteur que celui-ci devait comprendre que son choix signifie « qu’il n’y aura pas de procès », ce à quoi le principal intéressé a répondu par l’affirmative.

Wiseman, aujourd’hui âgé de 65 ans, faisait face à cinq chefs d’accusation, dont agression sexuelle, attouchements sur une personne de moins de 16 ans, voies de fait, ainsi que possession et production de pornographie juvénile. Les évènements qu’on lui reproche s’étaient produits entre novembre 2018 et avril 2021. La victime était alors âgée de 11 ans.

Le producteur a bénéficié d’un « arrêt conditionnel » sur les chefs d’agression sexuelle et de voies de fait, en vertu de l’arrêt Kienapple, selon lequel un accusé ne peut être déclaré coupable deux fois pour la même infraction. « Pour ce qui est des deux autres chefs, la défense a fourni certains éléments qui font en sorte qu’on ne peut plus prouver hors de tout doute le caractère pornographique de l’image en question », a indiqué à La Presse la procureure de la Couronne, MAnnabelle Sheppard.

Durant l’audience, l’avocate a lu une lettre écrite par la victime, qui disait qu’elle ne comprenait pas « pourquoi il touchait […] [ses] parties intimes ».

« Je regrette les gestes commis, qui n’étaient pas appropriés », a déclaré M. Wiseman à l’issue de l’audience, avant de se diriger vers un établissement de détention.

Il a dit espérer que la victime aura du soutien « pour passer à travers cette épreuve ».

Une peine en août

Le juge Labelle rendra sa décision sur la peine lors d’une audience prévue le 26 août. La défense et la poursuite lui ont toutefois déjà fait une suggestion commune, soit une peine de prison ferme de deux ans moins un jour, assortie d’une probation de trois ans, durant laquelle Luc Wiseman aurait à suivre une thérapie. Il en a d’ailleurs entamé une avec un sexologue en décembre dernier, selon son avocat.

Cette peine serait assortie de plusieurs conditions, dont celle de ne pas être en contact ou de communiquer avec la plaignante, dont l’identité est protégée par une ordonnance de non-publication. On imposerait alors aussi au producteur de ne pas travailler ou faire du bénévolat avec des mineurs ni de se trouver dans certains lieux comme une garderie, une école, des terrains de jeux, ou encore d’être en présence de mineurs sauf si un adulte responsable et au fait de la condamnation est aussi présent.

« On a également demandé que monsieur soit inscrit au registre des délinquants sexuels pour 20 ans, et réclamé une ordonnance d’interdiction de posséder une arme à feu ou toute arme prohibée, en vertu de l’article 109 du Code criminel », a précisé MSheppard.

En juin dernier, Luc Wiseman s’était déjà fait imposer une série de conditions supplémentaires dans l’attente de la suite du processus judiciaire pour qu’il reste loin des jeunes de moins de 16 ans.

Arrêté en mai 2021 par des enquêteurs du Service de police de la Ville de Montréal, Wiseman était jusque-là président et propriétaire de la maison de production Avanti Groupe, qui produit notamment la populaire émission Tout le monde en parle et, dans le passé, des succès comme La petite vie. L’entreprise avait confirmé dans la foulée que M. Wiseman avait quitté ses fonctions.

« La pédophilie m’écœure et il mérite la prison. Et bien plus qu’une sentence bonbon. Je ne peux me réjouir néanmoins aujourd’hui, car une jeune victime sera probablement traumatisée à vie à cause de ces gestes dégoûtants », a réagi jeudi sur Instagram Guy A. Lepage, animateur de Tout le monde en parle, dont M. Wiseman était coproducteur.

« Je me rappelle, le jour de l’arrestation de Wiseman, de ma colère envers lui, entremêlée avec ma peine envers elle. Guillaume Lespérance et moi l’avons crissé dehors la journée même puisque sa participation à l’émission n’était qu’administrative. [...] Justice est rendue, mais les dommages collatéraux vont subsister, car les gestes ont des conséquences », a insisté M. Lepage.

Avec La Presse Canadienne