(Ottawa) La Couronne a présenté des échanges par message texte entre Tamara Lich et Chris Barber, deux organisateurs du « convoi de la liberté » qui confirment que leur « centre de commandement » avait l’intention de bloquer le centre-ville d’Ottawa deux jours après l’arrivée des premiers camions.

Ces messages ont été présentés en preuve par la Couronne lors de l’audience de remise en liberté de Tamara Lich mardi. Celle-ci demeurera en détention jusqu’à vendredi puisque le juge de paix a décidé de mettre l’affaire en délibéré.

Tamara Lich a été arrêtée le 27 juin en Alberta pour non-respect de ses conditions. La Couronne lui reproche d’avoir été en contact avec Tom Marazzo, l’un des porte-parole de ce convoi qui a paralysé le centre-ville d’Ottawa durant trois semaines l’hiver dernier.

Dans les messages textes présentés à la cour, Mme Lich demande à Chris Barber de la rejoindre rapidement le matin du 30 janvier pour rencontrer les autres membres du « centre de commandement ». « Ils ont une stratégie pour bloquer la ville, écrit-elle. Je ne veux pas prendre ces décisions toute seule. »

« D’accord, je m’habille », lui répond Chris Barber.

Dans un autre échange daté du 23 janvier, soit avant l’arrivée du convoi de camions à Ottawa, Mme Lich émet des doutes sur Patrick King, une autre figure de proue du « convoi de la liberté » qui est toujours incarcéré en attente de son procès. « Il doit être moins visible et plus discret », écrit-elle. « Il a été arrêté plusieurs fois. Il s’est fait prendre à voler [des] anciens combattants. »

« Nous avons besoin de lui et je me fiche de son passé, mais il suffit d’un [faux pas] », ajoute-t-elle.

Chris Barber lui demande ensuite s’il s’est bien comporté à ce jour, ce à quoi elle répond : « Oui, en quelque sorte lol ».

La cour a émis un interdit de publication sur les documents contenant ces messages textes sauf pour ceux entre Chris Barber et Tamara Lich. Les deux sont conjointement accusés de méfait, d’entrave à la police, d’intimidation et d’avoir conseillé à d’autres de commettre des méfaits.

Pour la Couronne, les messages textes constituent une preuve que l’Albertaine était l’une des personnes responsables de la manifestation et que, par conséquent, elle devrait demeurer en détention d’autant plus qu’elle est accusée de ne pas avoir respecté ses conditions de libération.

« Pourquoi devrait-on lui faire confiance à nouveau ? », a demandé le procureur de la Couronne, Moiz Karimjee, au juge.

Dans une vidéo présentée à la cour, on voit Tamara Lich discuter quelques secondes avec Tom Marazzo. Les images ont été prises lors d’une cérémonie de remise de prix le 16 juin à Toronto. Le Justice Center for Constitutional Freedoms lui avait alors remis un prix pour son leadership durant cette manifestation contre la vaccination obligatoire et les mesures sanitaires pour protéger la population de la COVID-19.

Tamara Lich a assisté à l’audience par vidéo à partir du centre de détention d’Ottawa Carleton où elle a été transférée la semaine dernière. Son avocat, le criminaliste Lawrence Greenspon, qui est bien connu à Ottawa, estime qu’elle doit être libérée sous conditions.

Arrêtée durant les derniers jours du convoi de camions, Tamara Lich avait été libérée en mars avec une longue liste de conditions à respecter dont l’interdiction d’utiliser les médias sociaux et celle de ne pas « soutenir quoi que ce soit lié au convoi de la liberté ». Il lui était également interdit d’être en présence d’autres organisateurs du « convoi de la liberté » sans la présence d’un avocat.

Or, l’un de ses avocats était présent lors de la cérémonie, mais on ne le voit pas sur la vidéo ni sur une photo de Mme Lich et de M. Marazzo prise ce jour-là, a fait valoir M. Greenspon

« La preuve démontre qu’elle a respecté ses conditions », a-t-il dit. Il a par la suite souligné qu’il serait incongru d’incarcérer quelqu’un qui n’a aucun casier judiciaire pour des gestes « au pire minimalistes ou au mieux qui ne contreviennent pas » à l’ordre de la cour. Mme Lich aurait brièvement félicité M. Marazzo durant les quelques secondes où elle s’est adressée à lui.

Il a également réfuté l’argumentaire de la Couronne voulant que les messages textes soient une preuve que Mme Lich a voulu bloquer le centre-ville de la capitale fédérale.

« Elle ne dit pas qu’elle veut bloquer la ville, elle dit qu’elle ne veut pas prendre la décision toute seule », a-t-il souligné.

La cour a également émis un interdit de publication sur l’identité de la personne qui se porte garante pour la caution de Tamara Lich. Le juge de paix devrait faire connaître sa décision vendredi après-midi.

Avec La Presse Canadienne