Mécontents de la rémunération accordée pour les dossiers d’aide juridique, les avocats de la défense du Québec seront en grève lundi et mardi. Il s’agit pour eux d’un moyen de pression visant à obtenir une « réforme majeure des tarifs et des structures tarifaires » en aide juridique.

Au Québec, un avocat de la pratique privée qui endosse un dossier d’aide juridique reçoit un salaire fixe allant de 415 à 600 $. Ces derniers demandent donc un « réinvestissement massif dans le système de justice » pour ce type de cas, qui représente « 75 % de tous les dossiers autorisés en matière criminelle ».

« Les salaires sont tellement bas que ça a un impact négatif », dénonce Me Élizabeth Ménard, présidente de l’Association des avocats de la défense de Montréal (AADM). « L’accès à la justice des personnes les plus vulnérables de la société diminue, parce que les avocats délaissent l’aide juridique. »

Pour elle, l’augmentation de la rémunération aux avocats dans un contexte d’aide juridique aiderait à redonner une certaine attractivité à ce genre de dossier. Cela permettrait d’aider davantage de personnes dans le besoin.

Autre source d’irritation : la somme versée à l’avocat demeure la même, peu importe la durée du processus judiciaire. Un mode de fonctionnement « paradoxal et aberrant », selon l’avocate.

« Ça peut durer jusqu’à 30 mois, mais ça ne fait pas non plus de différence si je plaide coupable dès le début, explique-t-elle. Donc, vous comprenez que ça encourage les plaidoiries de culpabilité rapides. »

Réclamer un « changement d’idéologie »

La dernière réforme majeure de la structure de tarification en aide juridique remonte à 1996. Me Élizabeth Ménard ne mâche pas ses mots : elle réclame un « changement d’idéologie par rapport à l’aide juridique » de la part du ministère de la Justice.

Ce n’est pas normal qu’on ait un système de justice à deux vitesses, un pour les pauvres et l’autre pour les riches.

Me Élizabeth Ménard, présidente de l’AADM

Pour se faire entendre, les avocats de la défense boycottent depuis le 20 juin tous les dossiers qui concernent les agressions sexuelles ou la violence conjugale. Me Ménard est consciente que cela contribue au problème qu’elle combat, mais considère que ce « moyen de pression » est « nécessaire » pour la mise en place d’une nouvelle réforme.

Me Élizabeth Ménard n’a « pas de montant en tête », mais elle désire que le gouvernement leur propose une rémunération « significativement plus élevée ». Si aucune action n’est prise, prévient-elle, l’AADM tiendra un vote pour mettre sur la glace toutes les demandes en aide juridique à sa prochaine assemblée, le 6 juillet.

Le ministère de la Justice n’avait pas répondu à La Presse au moment de publier.