(Québec) Québec aurait pu uniquement modifier la Loi sur la santé publique (LSP) pour établir un « cadre clair de transition » vers la fin de l’état d’urgence sanitaire plutôt que de présenter un projet de loi distinct, tranche le Barreau du Québec, qui émet des réserves sur le texte législatif proposé par le ministre de la Santé.

Le Barreau émet une série de préoccupations sur le projet de loi 28, qui vise à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire, en vigueur depuis le 13 mars 2020. Dans une lettre adressée au ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, la bâtonnière du Québec, MCatherine Claveau, fait valoir que le gouvernement aurait pu miser sur une modification de la LSP pour atteindre ses visées.

« Le Barreau du Québec comprend la volonté du gouvernement de procéder par modification législative. Nous sommes toutefois toujours d’avis que la LSP devrait être modifiée afin de prévoir des règles pérennes en matière de transition entre un état d’urgence sanitaire et un certain retour à la normale », écrit-elle dans sa missive datée du 18 mars dernier.

Les modifications apportées à la LSP auraient pu permettre de prévoir « l’existence de certains pouvoirs résiduaires tels que l’imposition du port du masque afin de permettre la saine gestion des décrets et des arrêtés encore en vigueur au moment du déclenchement de la période transitoire ».

Ainsi, il n’aurait pas été nécessaire de présenter ce projet de loi. Ces modifications à la LSP auraient permis d’assurer une certaine prévisibilité juridique à l’évolution dans le temps d’une déclaration d’état d’urgence sanitaire, notamment en prévoyant un cadre clair de transition.

Le Barreau du Québec, dans une lettre adressée au ministre Christian Dubé

Québec se garde des pouvoirs jusqu’en décembre 2022, alors que « trois, quatre » décrets resteront en vigueur une fois l’état d’urgence levé, a fait savoir le ministre Dubé, jeudi.

L’opposition a qualifié le projet de loi de « supercherie », de « chèque en blanc » et de « mascarade ». M. Dubé a promis qu’au plus tard le 25 mars un « ménage » serait effectué dans les décrets et arrêtés toujours en vigueur pour ne conserver que ceux qui resteront en place. C’est une recommandation que fait d’ailleurs le Barreau dans sa missive.

Reddition de comptes et contrats

Le Barreau du Québec déplore que le projet de loi 28 ne prévoie aucune reddition de comptes pour la période prévue pour la transition. En vertu de la LSP, le gouvernement doit présenter un « rapport d’évènement » dans lequel il doit détailler « les mesures d’intervention mises en œuvre et les pouvoirs exercés ». Québec s’est engagé à le faire d’ici la fin de la session parlementaire, en juin.

Mais rien n’est donc prévu pour la période entre l’adoption du projet de loi et décembre 2022. Le Barreau suggère que le texte législatif soit modifié pour y prévoir un mécanisme de reddition de comptes. Par ailleurs, Québec devrait mieux justifier le délai de cinq ans que se garde le gouvernement pour prolonger certains contrats conclus de gré à gré pendant l’urgence sanitaire, selon le Barreau.

« Les mesures exceptionnelles adoptées en vertu de la LSP l’ont été lorsqu’une situation d’urgence existait et lorsqu’il était impossible de garantir l’approvisionnement, le transport et l’entreposage du matériel nécessaire à la lutte contre la pandémie de la COVID-19 en utilisant les règles habituelles, ce qui n’est plus le cas après plus de deux ans de pandémie », écrit le Barreau.

Par ailleurs, si le gouvernement veut renouveler une entente, rien ne l’empêche d’accorder un contrat en vertu de la Loi sur les contrats des organismes publics.