Un pasteur véreux qui a arraché plus de 250 000 $ à ses ouailles en abusant de son « ascendant » d’homme de Dieu a été condamné à deux ans et demi d’emprisonnement, ce qui a mis fin à un feuilleton judiciaire d’une décennie. Mwinda Lezoka devra maintenant rembourser ses victimes pour éviter de rester en prison.

« Les gravités objective et subjective de l’infraction sont considérables. Les circonstances aggravantes sont nombreuses. Les circonstances atténuantes sont limitées. Il est le seul responsable de la fraude », a conclu le juge Yves Paradis, mercredi après-midi au palais de justice de Montréal.

Après avoir étiré le processus judiciaire pendant plus de 10 ans, l’homme de 58 ans se retrouve donc finalement derrière les barreaux. Depuis 2011, Mwinda Lezoka a multiplié les remises, les requêtes et les changements d’avocat pour éviter ce jour fatidique. Il a d’ailleurs invoqué à deux reprises l’arrêt Jordan pour réclamer l’arrêt du processus judiciaire.

En 2020, le juge Yves Paradis a reconnu Mwinda Lezoka coupable d’avoir fraudé certains fidèles de son Église entre 2005 et 2009. Le magistrat a déterminé que le pasteur avait profité de son « ascendant indéniable » sur ses ouailles pour leur soutirer 268 000 $.

À cette époque, il dirigeait la Communauté chrétienne de Béthel, une Église évangélique du quartier Ahuntsic, à Montréal. Il en était « l’âme dirigeante » non seulement d’un point de vue spirituel, mais également des éléments « matériels » de la vie communautaire, résume le juge.

En obtenant ces sommes, Mwinda Lezoka s’est assuré de « maintenir son pouvoir et son statut enviable » au sein de l’Église, de même que « son influence et son prestige » au sein de la communauté, a conclu le juge.

« Abus de confiance »

Le pasteur avait plongé son Église dans un gouffre financier en investissant dans d’ambitieux projets immobiliers. Il avait poussé deux fidèles – des sœurs – à hypothéquer leur maison pour prêter 127 000 $ à l’Église. Il avait aussi soutiré 50 000 $ à une fidèle sous des prétextes fallacieux.

Le diacre de l’Église, Fortunato Orsini, s’est carrément retrouvé dans la rue après avoir perdu sa maison et une somme de 80 000 $. À l’époque, il dormait sur une chaise à l’église et avait du mal à se nourrir. Depuis, malgré sa maladie, il doit s’astreindre à un travail à la chaîne pour rembourser ses dettes. « J’ai pas le choix pour survivre », a-t-il témoigné l’automne dernier.

« L’ascendant qu’il [Lezoka] exerçait sur ses victimes a été un élément significatif pour l’obtention des différentes sommes. Il s’agit d’un abus de confiance, une circonstance aggravante », a déterminé mercredi le juge Paradis.

C’est pourquoi le magistrat a condamné l’accusé à une peine relativement sévère. Celle-ci se retrouve dans « l’échelon supérieur de la fourchette » de peine pour ce type de fraude. La Couronne réclamait de trois à quatre ans d’emprisonnement, contre neuf mois de détention pour la défense.

En plus de sa peine de détention, le pasteur déchu devra remettre 268 000 $ à ses victimes d’ici 2029 dans le cadre d’une ordonnance de dédommagement. De plus, le juge a condamné Mwinda Lezoka à une amende de remplacement de 50 000 $. À défaut de payer cette amende, l’ex-pasteur sera condamné à un an de prison supplémentaire.

Notons que Mwinda Lezoka a porté en appel le jugement sur sa culpabilité.

Me Jérôme Gagné représente le ministère public, alors que MCynthia Lacombe défend M. Lezoka.