Alors que Le Batman domine le box-office depuis deux semaines, les crimes d’un émule québécois du justicier de Gotham ont été étalés au grand jour mardi, lors d’une audience au palais de justice de Montréal.

Alain Prud’homme, ancien directeur de l’École des métiers de la construction de Montréal, a plaidé coupable à des accusations de fraude, fraude envers le gouvernement et abus de confiance, en lien avec des détournements de fonds publics qui ont notamment servi à la construction de sa propre « Batcave » personnelle.

Selon l’exposé des faits déposé devant le juge de la Cour supérieure Alexandre Boucher mardi, les crimes se seraient étalés de 2011 à 2017. M. Prud’homme aurait accepté plusieurs cadeaux de personnes qui faisaient affaire avec le gouvernement pendant son mandat à la tête de l’École. Il aurait reçu un certificat cadeau de 5000 $ dans une agence de voyages (qu’il n’a pas eu le temps d’utiliser) et un voyage à Milan d’une valeur de 1000 $. Deux entrepreneurs seraient aussi venus chez lui effectuer des travaux d’une valeur de 36 500 $ dans son garage.

Des témoins ont confié aux enquêteurs de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) que le garage était « très luxueux », que M. Prud’homme l’appelait « sa Batcave » et qu’il avait servi à exposer des voitures de luxe, selon les documents produits par les policiers pour justifier les mandats de perquisition pendant l’enquête.

Les entreprises Abella et Valdi-Tech, qui ont réalisé les travaux, ont reçu ensemble pour près d’un million de dollars de contrats publics de l’École des métiers de la construction grâce à M. Prud’homme, en contravention avec le processus habituel d’octroi des contrats, selon le résumé des faits déposé en preuve.

Toujours selon le résumé, Alain Prud’homme a acheté avec le budget de l’école pour 20 000 $ de produits Apple, en fabriquant de faux documents pour contourner un moratoire sur l’achat de ces produits. Le matériel a été utilisé à des fins personnelles par lui et d’autres employés de l’école. Il encore pigé dans les fonds publics pour acheter des appareils photo, audio et culinaires d’une valeur de 50 000 $ qui n’étaient, pour la grande majorité, d’aucune utilité pour l’établissement scolaire.

Il avait ordre de réinvestir dans le réseau scolaire

Pour couronner le tout, le directeur avait autorisé la « construction subreptice » d’une salle d’entraînement et de vestiaires adjacents, au coût de 50 000 à 75 000 $, dans les locaux de l’école, sans l’autorisation de la Commission scolaire de Montréal, alors qu’il avait pourtant eu ordre de réinvestir tous les surplus dans le réseau scolaire.

M. Prud’homme recevra sa sentence à une date ultérieure.

L’entrepreneur Modesto Abella a quant à lui plaidé coupable à une accusation de fraude envers le gouvernement et une accusation de fabrication de fausses factures dans ce dossier. L’entrepreneur Enrico Di Paola a plaidé coupable à une seule accusation de fraude envers le gouvernement parce qu’il a offert des cadeaux à M. Prud’homme, mais l’exposé des faits ne mentionne pas qu’il a reçu quoi que ce soit en retour. Le dossier de ces deux co-accusés reviendra devant la cour le 20 avril.

La poursuite était représentée par MNicolas Cornelius Ammerlaan et Me Émilie Robert, du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alain Prud’homme était représenté par MLucie Joncas et MJacques Normandeau, alors que ses deux co-accusés étaient représentés par MAlexandre Bergevin et MJean Arsenault.

Avec Louis-Samuel Perron, La Presse