Jugeant leur intervention « justifiée », le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) ne déposera pas d’accusations contre les trois policiers montréalais qui sont intervenus contre un homme armé dans le Vieux-Port de Montréal en septembre 2020, tirant des dizaines de coups de feu et blessant au passage des civils.

« L’analyse de la preuve ne révèle pas la commission d’une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) », tranche l’organisation dans sa décision rendue mardi, à l’issue d’une analyse du rapport du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) par deux procureurs indépendants.

Selon ces derniers, « l’usage des armes à feu par les policiers ne correspondait pas à une infraction criminelle, même si cet usage a vraisemblablement mené aux blessures subies par deux hommes ». « Il ne peut être raisonnablement soutenu que leur utilisation d’armes à feu ait été faite sans excuse légitime, ni que leurs comportements présentaient un écart marqué par rapport au comportement d’un policier raisonnable dans les mêmes circonstances », ajoutent les procureurs.

Ainsi, « l’emploi de la force par les agents de la paix était justifié ». « L’intervention était légale et se fondait principalement sur le devoir imposé aux policiers d’assurer la sécurité et la vie des personnes. Considérant les coups de feu tirés […], ces derniers avaient des motifs raisonnables d’estimer que la force appliquée à son endroit était nécessaire », illustre le DPCP, qui précise que l’article 25 du Code criminel, qui traite entre autres du travail des agents de la paix, a été respecté.

Bref rappel des faits

La fusillade dont il est ici question était survenue dans le Vieux-Port de Montréal, le 13 septembre 2020, en pleine nuit, aux alentours de 2 h du matin. Cinq personnes, dont un policier, avaient été blessées. Selon nos informations, un total d’au moins 31 coups de feu ont été tirés.

Trois policiers du SPVM s’étaient d’abord rendus près du quai de l’Horloge en raison d’une plainte concernant du bruit et de la musique forte. Peu après leur arrivée sur les lieux, un homme a tiré des coups de feu en leur direction, atteignant l’un des policiers du SPVM. Ces derniers ont répliqué, atteignant aussi l’homme qui avait d’abord ouvert le feu. Dans sa décision, le DPCP précise d’ailleurs que le suspect « semble d’abord obtempérer et se penche au sol », mais qu’alors qu’il s’exécute, « il se retourne subitement et tire en direction » d’un policier.

Le principal suspect dans cette affaire, Adam Pichette, avait eu une altercation dans un bar avec un individu qu’il connaissait. Les deux hommes ont été expulsés de l’établissement, mais leur dispute s’est poursuivie dehors. Le suspect a alors extirpé une arme de poing de son sac en bandoulière et tiré en l’air. Un témoin a ensuite avisé des policiers qui circulaient à vélo. Lorsque ceux-ci se sont approchés, le suspect, qui était « lourdement intoxiqué » par l’alcool ou la drogue, a alors ouvert le feu vers eux, sans avertissement.

Les policiers, qui étaient expérimentés selon nos sources, ont alors immédiatement dégainé leur pistolet et répliqué dans un chassé-croisé qui aurait pu avoir de bien plus graves conséquences. Le suspect a été transporté à l’hôpital où, durant un certain temps, on a craint pour sa vie. Son état s’est toutefois stabilisé depuis. Au moment des faits, l’un des tirs du suspect avait atteint un policier au mollet. Trois civils ont aussi reçu des projectiles, et subi des blessures mineures.

Trois personnes blessées ont été rencontrées par un procureur qui participait à l’enquête, et une quatrième a été informée par courrier recommandé.

Avec Daniel Renaud et Mayssa Ferah, La Presse