Marie-Josée Viau a été condamnée vendredi matin à la prison à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans, pour les meurtres des frères Vincenzo et Giuseppe Falduto, commis dans le garage de sa propriété de Saint-Jude, près de Saint-Hyacinthe, à l’été 2016.

Il avait déjà été établi que la femme de 47 ans, reconnue coupable de complot et des meurtres au second degré des deux frères par un jury en novembre dernier, devait purger une peine à perpétuité, mais il restait au juge Éric Downs de la Cour supérieure à déterminer la durée de la période d’admissibilité à une libération conditionnelle.

La poursuite demandait que la femme purge entre 15 et 17 ans de pénitencier avant d’être admissible à une libération conditionnelle, alors que la défense réclamait 10 ans, soit la durée suggérée par le jury le jour du verdict.

Marie-Josée Viau, qui a contracté la COVID-19 récemment et qui n’a pas tout à fait terminé sa période d’isolement, a suivi l’audience de façon virtuelle, de la prison où elle est détenue, portant un masque et une combinaison médicale blanche.

Elle a hoché la tête de haut en bas lorsqu’elle a entendu le juge Downs prononcer les mots « 12 ans ».

Extrême négligence envers la vie d’autrui

Parmi les facteurs atténuants, le juge a considéré que Marie-Josée Viau menait une vie rangée et active avant de rencontrer un individu relié au crime organisé traditionnel italien (COTI) qui l’a menée « sur une route dangereuse ».

Il a également dit que les chances de réhabilitation étaient bonnes et que les risques de récidive étaient faibles.

Comme facteur aggravant, le magistrat a souligné que la condamnée avait fait « preuve d’une extrême négligence pour la vie d’autrui », en acceptant d’entreposer un véritable arsenal chez elle, et « d’un aveuglement volontaire extrême ».

Il a ajouté qu’elle avait fait preuve de « laxisme moral en espérant monter dans les rangs du COTI », qu’elle connaissait le plan, qu’elle avait facilité la commission de meurtres et qu’elle avait ensuite fait des actions pour se débarrasser des corps en les brûlant, « plongeant ainsi les proches des victimes dans l’angoisse et le désarroi ».

Un membre de la famille a assisté à l’audience, assis dans la salle du Centre de services judiciaires Gouin.

« Nous sommes satisfaites. Le juge s’est dégagé du minimum de 10 ans avant d’être admissible à une libération conditionnelle et cela envoie un message dissuasif. Il a aussi souligné le fait que les membres de la famille Falduto n’ont pu offrir de sépulture aux victimes et a parlé de leur détresse, et nous espérons que cela les aidera à poursuivre leur deuil », a déclaré à La Presse la procureure MIsabelle Poulin, qui a représenté la poursuite durant les procédures, en compagnie de ses collègues MKarine Cordeau et MMarie-Christine Godbout.

« Je suis soulagée et satisfaite que le juge n’ait pas donné écho à la demande de la Couronne. Mais il n’a pas suivi non plus la recommandation de 10 ans du jury. Je vais prendre le temps de lire le jugement avant de me prononcer davantage », a déclaré l’avocate de Viau, MMylène Lareau.

Piégée par un tueur devenu taupe

Les frères Falduto ont été tués le 30 juin 2016 sur la propriété de Marie-Josée Viau et de son conjoint Guy Dion par un tueur à gages de la mafia, accompagné d’un autre homme dont on doit taire l’identité. Le meurtrier et son accompagnateur auraient agi pour le compte du défunt chef de clan de la mafia montréalaise Salvatore Scoppa.

Trois ans plus tard, le tueur à gages a collaboré avec la Sûreté du Québec. Il a enregistré Marie-Josée Viau et Guy Dion à leur insu et le couple a été arrêté en octobre 2019.

Viau et Dion étaient, à l’origine, accusés de complot et des meurtres au premier degré des frères Falduto. Selon la théorie de la poursuite, le couple a démembré les corps des victimes et les a brûlés durant de longues heures, à ciel ouvert, en plus de faire disparaître toute trace du crime.

Toutefois, après un procès de plusieurs mois, Marie-Josée Viau a été reconnue coupable de complot et de meurtres au second degré, alors que Guy Dion a été déclaré non coupable.

La poursuite a décidé de ne pas porter les verdicts en appel, mais la défense, oui, dans le cas de Marie-Josée Viau.

Cette dernière, qui était en liberté provisoire durant son procès, est détenue depuis le prononcé du verdict.

Durant le procès, Marie-Josée Viau et Guy Dion ont témoigné et nié toutes les prétentions de la poursuite.

Toutefois, dans les heures qui ont suivi leur arrestation, Marie-Josée Viau et Guy Dion avaient fait des aveux filmés aux enquêteurs qui ont cependant été déclarés inadmissibles par le juge Downs, car, entre autres, le magistrat a noté des violations de la Charte, de la common law et du droit à l’avocat.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.