Danny Arsenault ne nie pas qu’il a envoyé des centaines de messages à Charlotte Bouchard sur les réseaux sociaux. Mais pour ce livreur de 42 ans, il ne s’agit pas du tout de harcèlement criminel. « Je m’excuse, mais Mme Bouchard n’était pas en danger. Je n’ai jamais été agressif. C’est complètement absurde. »

Danny Arsenault, qui se représente seul, n’a pas caché qu’il était bel et bien l’auteur de tous les messages qui ont été déposés à son procès pour harcèlement criminel et communications harcelantes à l’endroit de la sœur de la joueuse de tennis Eugenie Bouchard, Charlotte Bouchard. Des messages qui pouvaient passer de « je vous trouve belle au point de perdre la raison » à « Doggystyle, do you feel it ? ». Ces commentaires étaient surtout publiés sur Instagram, et ce, de 2014 à 2018.

Mardi au palais de justice de Montréal, M. Arsenault a commencé ses plaidoiries en confiant à la juge Silvie Kovacevich qu’il n’avait pas une « vie faste » avec les femmes.

« Les sœurs Bouchard, c’était un phénomène à l’époque. J’avais 35 ans, célibataire… je m’excuse, s’est exprimé M. Arsenault. Je ne suis pas le modèle type de gens qui font du trouble sur les réseaux sociaux, ce qu’on appelle des trolls. Ce n’est pas du tout mon cas. »

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Danny Arsenault

Cet homme de Verdun, qui est livreur à son compte, affirme qu’il n’a jamais voulu terrifier Charlotte Bouchard. « Elle était un symbole intouchable, a-t-il plaidé avec calme. C’était, de ma part, une tentative d’approche. Et je pense qu’elle a volontairement maintenu la porte ouverte. »

Même s’il a indiqué qu’il a déjà été reçu un diagnostic de schizophrène paranoïde, il a choisi de ne pas invoquer des problèmes de santé mentale pour se défendre.

M. Arsenault plaide que l’influenceuse, qui a 96 000 abonnés sur Instagram, aurait dû lui signifier clairement qu’elle n’appréciait pas ses messages, puisqu’il n’avait pas compris qu’il l’importunait. « C’est non justifié comme peur », s’est-il défendu.

Mme Bouchard instrumentalise le système judiciaire pour se bâtir une notoriété.

Danny Arsenault, accusé

De son côté, Mme Bouchard a témoigné lundi qu’elle avait bloqué une vingtaine de comptes Instagram appartenant à l’accusé. Chaque fois, il se créait un nouveau compte et recommençait à l’inonder de messages.

Les autorités ont préservé près de 1850 communications de la part de Danny Arsenault à l’intention de la présumée victime. Sous une seule publication sur Twitter, l’accusé pouvait laisser jusqu’à 150 commentaires. Il a aussi pris des vidéos et photos près du magasin de vêtements où elle travaillait, à Westmount.

Un problème contemporain

Le procureur de la Couronne a déjà fait savoir qu’il ne demanderait pas l’incarcération de M. Arsenault. Il n’invoquera pas non plus des problèmes de santé mentale. Des décisions qui ont d’ailleurs semblé soulager l’accusé.

Par contre, MCharles Doucet aimerait un jugement dans lequel il sera indiqué que le fait de « bloquer » une personne sur un réseau social est une manière bien claire de signifier à cette dernière qu’on ne souhaite plus avoir de contacts avec elle. Il a souligné qu’il s’agissait d’un sujet bien d’actualité, puisque nous entendons parler de plus en plus de « violence et harcèlement sur les réseaux sociaux ». « Un procès 2.0 », a-t-il lancé.

« Des gens n’ont pas un droit, derrière leur ordinateur, de dire tout ce qu’ils veulent sans impunité. C’est pour ça que nous sommes là aujourd’hui », a-t-il plaidé, ajoutant que l’accusé ne se souciait pas du tout de Mme Bouchard dans toute cette histoire. Sinon, lorsqu’elle le bloquait des réseaux sociaux, il aurait dû comprendre qu’elle ne voulait plus de contact avec lui.

MDoucet a rappelé que Charlotte Bouchard a reçu des centaines de messages au fil des ans. « M. Arsenault lui a notamment écrit : “Je vais te piner dans le cul.” Si je croise une fille sur la rue et que je lui dis ça, ça peut constituer du harcèlement criminel. Eh bien, dans ce dossier, nous en avons des centaines et des centaines de commentaires comme celui-ci. »

La juge rendra sa décision le 22 juin prochain.