(Ottawa) Alors que l’on commence à ressentir un parfum de printemps dans de nombreuses régions, le plus haut tribunal du pays s’apprête à se pencher sur le devoir de diligence des municipalités dans le déneigement des rues.

L’audience en Cour suprême du Canada, jeudi, pourrait également permettre de déterminer à quel moment et à quel point un organisme public, comme une administration municipale, peut être tenu responsable de ses décisions opérationnelles, souvent basées sur les ressources disponibles.

Taryn Joy Marchi soutient que la Ville de Nelson, en Colombie-Britannique, a mis la sécurité des citoyens en péril lors des opérations de déneigement au centre-ville après une tempête, au début de janvier 2015.

Au petit matin du 5 janvier, les équipes de déneigement ont laissé des petits bancs de neige au bord de la rue, le long du trottoir. Le lendemain après-midi, Mme Marchi a garé son véhicule en angle sur la rue principale et elle a essayé de traverser le banc de neige pour rejoindre le trottoir, en portant des chaussures de sport à semelle épaisse. Mais son pied s’est enfoncé dans la neige, elle est tombée et a subi une grave blessure à la jambe, qui l’a conduite à l’hôpital.

En première instance, Mme Marchi a soutenu que la Ville aurait dû pratiquer des passages dans les bancs de neige pour permettre un accès sécuritaire aux trottoirs. Le tribunal a rejeté sa plainte, estimant que la Ville était exonérée de toute responsabilité, parce que la Ville doit prendre des décisions en fonction de ses ressources. Le tribunal a aussi estimé que Mme Marchi était consciente des risques en traversant le banc de neige et qu’elle a été au fond l’« artisane de son propre malheur ».

Mais la Cour d’appel a ordonné la tenue d’un nouveau procès parce que le juge de première instance avait commis des erreurs de droit, notamment sur l’obligation de diligence de la municipalité et sur la présumée « négligence » de la plaignante. La Ville de Nelson a alors décidé de porter cette décision en Cour suprême, qui a accueilli la demande en août dernier.

Dans une soumission écrite à la Cour suprême, la Ville plaide que ses politiques de déneigement constituent « un exemple clair d’un choix politique fondamental », qui devrait être exonéré de toute responsabilité civile. Les politiques de déneigement, écrites et non écrites, de la municipalité impliquent clairement un équilibre entre des intérêts concurrents, selon la Ville de Nelson. « C’est le cœur même d’une décision politique : allouer des ressources limitées sur la base d’un pouvoir discrétionnaire exercé de bonne foi. »

Dans son dossier à la Cour suprême, Mme Marchi soutient que les employés de la Ville ont pris un certain nombre de décisions opérationnelles qui ne respectent plus la norme de diligence attendue d’une municipalité — des décisions qui ne sont pas prévues dans la politique écrite de déneigement.