Jérémie Fortier-Grenier était si obsédé par le modeste chalet de son père qu’il a planifié de le tuer pour en hériter. Alors qu’il croyait renouer avec son fils, Richard Grenier est tombé dans le « piège » parfait. Le Montréalais de 26 ans a été reconnu coupable par le jury du meurtre prémédité de son père vendredi matin, au terme de cinq jours de délibérations.

« Coupable au premier degré », a lâché le président du jury. Dans le box des accusés, Jérémie Fortier-Grenier n’a pas bronché en entendant ces mots lourds de conséquences. Il est en effet automatiquement condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.

Le verdict a fortement ébranlé la veuve de Richard Grenier qui est restée dans la salle d’audience pendant une heure pour se remettre de ses émotions. Tania Hamon, qui a témoigné au procès, venait d’avoir un enfant avec Richard Grenier quelques mois avant le meurtre.

Le jury a ainsi complètement rejeté la version de Jérémie Fortier-Grenier. Le jeune homme se présentait comme un sans-abri qui voulait simplement « retisser » ses liens avec son père. Il a tenté de convaincre les jurés que Richard Grenier l’avait violemment agrippé par le cou avant le meurtre. Il cherchait donc à être reconnu coupable d’une accusation moindre d’homicide involontaire.

Dans les faits, Jérémie Fortier-Grenier planifiait de tuer son père depuis une semaine. Son historique internet montre en effet qu’il a cherché à de nombreuses reprises comment « tuer quelqu’un sans laisser de traces » ou « comment trancher la gorge de quelqu’un » en élaborant son plan.

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Photo montrant l’arme du crime quelques jours avant le meurtre. La photo a été retrouvée dans le cellulaire de Jérémie Fortier-Grenier.

Le meurtrier a ainsi organisé une rencontre avec son père le 10 mai 2018 sous prétexte d’avoir besoin d’aide pour aller récupérer ses bottes à son travail, alors que sa voiture était brisée. Or, toute cette histoire était fausse. Jérémie Fortier-Grenier était fin prêt : il avait quatre longs couteaux avec lui.

Le soir fatidique, dans un stationnement désert d’un secteur industriel de l’arrondissement de Saint-Laurent, Jérémie Fortier-Grenier a poignardé son père à une trentaine de reprises. Celui-ci affichait de nombreuses plaies de défense. Le meurtrier a ensuite caché maladroitement le corps dans un boisé adjacent. C’est pourquoi le jury l’a également reconnu coupable d’outrage à un cadavre.

Après le meurtre, Jérémie Fortier-Grenier s’est rendu jusqu’au chalet de son père, près de Mont-Laurier. Même s’il n’avait pas le droit, le fils fréquentait régulièrement la modeste bâtisse. La propriété du chalet semble être d’ailleurs au cœur du mobile du meurtre. L’accusé acceptait mal que son père refuse de lui céder le chalet. C’était son « obsession », selon la Couronne.

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Photo du chalet de la victime, Richard Grenier

En effet, Jérémie Fortier-Grenier racontait à son entourage qu’il s’apprêtait à hériter du chalet. D’ailleurs, il avait dit à sa copine que son père était mort à la guerre. Le jeune homme n’hésitait pas à mentir à ses proches. À son employeur, il disait avoir des traitements pour un cancer pour ne pas travailler le vendredi. À sa copine, il affirmait vivre dans un quartier de riches et occuper un poste de directeur chez Bombardier.

À la barre des témoins, Jérémie Fortier-Grenier a complètement contredit ses aveux faits aux policiers. Il a ainsi raconté au jury avoir été attaqué par son père dans le véhicule. Le fils venait alors d’apprendre que son père n’était « pas sûr » de l’aimer. Il a alors brandi un couteau en lançant : « Est-ce que tu m’aimes ? Moi, je t’aime. Écoute-moi, papa, s’il te plaît. »

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Richard Grenier

C’est à ce moment que Richard Grenier aurait pris son fils par la gorge en disant « Toi, y faut que tu crèves, criss. » Aux enquêteurs, Jérémie Fortier-Grenier avait pourtant confié avoir poignardé son père en premier. Les deux hommes se seraient ensuite battus pour la possession de l’arme. Dans tous les cas, le témoignage de l’accusé n’a pas suscité de doute raisonnable dans l’esprit des jurés.

Le dossier revient en cour mercredi prochain pour les observations sur la peine. Il s’agit toutefois d’une formalité puisque la peine est déjà connue.

Jérémie Fortier-Grenier est défendu par MMartin Latour et MSabrina Lapolla, alors que MClaudine Charest et MNadia Bérubé représentent le ministère public. Le juge Claude Champagne préside le procès.