(Ottawa) Un tribunal a rejeté une demande du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) pour recueillir des informations étrangères, jugeant que la technique proposée s’éloignerait du mandat légal du service d’espionnage.

Le SCRS cherchait à obtenir des mandats judiciaires pour pouvoir collecter des renseignements dans d’autres pays, à partir d’un endroit au Canada, pour aider un ministre fédéral non identifié.

Le service est autorisé à recueillir des renseignements sur les menaces à la sécurité nationale partout dans le monde, mais il y a des limites à la collecte de renseignements sans rapport avec la sécurité à l’extérieur du Canada.

L’article 16 de la Loi sur le SCRS permet au service de recueillir, au Canada, des renseignements étrangers relatifs aux capacités, aux intentions ou aux activités de tout État étranger, tant que la collecte de renseignements ne vise pas les Canadiens.

Le tribunal a déjà noté que le Parlement a imposé l’exigence « au Canada » parce que la collecte de renseignements étrangers dans d’autres pays pourrait nuire aux relations internationales du Canada.

Dans une décision récemment rendue, le juge de la Cour fédérale Patrick Gleeson a conclu que l’utilisation proposée par le service des pouvoirs d’enquête ne satisfaisait pas à l’exigence « au Canada » de la loi.

Le juge Gleeson a rendu la décision en juillet dernier, mais une version avec de nombreux passages caviardés a été publiée mercredi.

Le porte-parole du SCRS, John Townsend, a déclaré que les avocats fédéraux avaient interjeté appel sur des questions précises relatives à l’interprétation du pouvoir du service de collecter des renseignements étrangers à l’appui des ministres de la Défense et des Affaires étrangères.

« La collecte de renseignements étrangers sélectionnés est cruciale pour la conduite des affaires du gouvernement du Canada et nos intérêts en matière de sécurité nationale », a souligné M. Townsend.

« Elle soutient un large éventail de priorités, y compris les principales questions de politique étrangère et de défense nationale. »

Les expurgations signifient que la méthode proposée par le SCRS, les informations recherchées et les pays concernés ne sont pas connus du public.

Les avocats fédéraux ont reconnu que l’information peut se trouver à l’extérieur des frontières du Canada, mais ont néanmoins soutenu que la méthode de collecte proposée se produit « au Canada », comme le terme est utilisé dans la loi.

Cependant, deux avocats embauchés pour aider le tribunal dans le dossier n’étaient pas du même avis, affirmant que la méthode ne pouvait pas être correctement qualifiée comme se déroulant « au Canada ». De plus, même si c’était possible, la méthode est contraire au droit étranger et international, ont-ils déclaré à la cour.

En rejetant la demande de mandats, le juge Gleeson a fait référence à une décision antérieure. Dans celle-ci, on soulignait que le Parlement n’avait pas l’intention que le mandat limité de collecte de renseignements étrangers du SCRS ouvre la porte à des interprétations permettant des opérations secrètes de renseignement à l’étranger.

De telles activités, a conclu la Cour fédérale dans une affaire antérieure, pourraient enfreindre le droit international et les lois nationales d’autres pays, ainsi que ternir la réputation du Canada.

« Le pouvoir que le Parlement a accordé au Service pour qu’il se livre à des activités intrusives dans l’exercice de ses fonctions est limité et contrôlé », a écrit le juge Gleeson dans la dernière décision.

Il a ajouté que la méthode proposée par le SCRS « implique une activité importante à l’extérieur du Canada, une activité à la fois juridiquement pertinente et qui présente les risques que le Parlement a cherché à atténuer ».