C’est l’histoire d’un fils qui désirait l’amour de son père. D’un fils qui a mis son sordide plan à exécution, lorsque son père l’a rejeté. « Je lui ai dit : “Je t’aime.” Il m’a dit : “Ouain.” J’ai donné le premier coup », confie-t-il, sanglotant. Les aveux aux policiers de Jérémie Fortier-Grenier ont été présentés au jury mercredi à son procès pour meurtre prémédité.

Pendant quatre heures, Jérémie Fortier-Grenier s’emmure dans le silence, dormant même pendant un long moment. Il refuse fermement de parler de la mort de son père, dont le corps a été retrouvé la veille dans un bois de l’arrondissement de Saint-Laurent à Montréal. Richard Grenier avait été poignardé à 32 reprises.

Puis le jeune homme craque. « Mon père a arrêté d’être là pour moi », confie-t-il à l’enquêteur. Il reproche à son père d’avoir tardé à répondre à ses messages sur Facebook et d’avoir déjà refusé de lui prêter son camion pour aller au cinéma. « Je ne comprenais pas », pleurniche-t-il. Il évoque aussi le vol par son père de 20 000 $ en héritage. « J’avais plus une cenne », dit-il.

Autre source de frustration : Richard Grenier voulait vendre son chalet près de Mont-Laurier, au lieu de le donner à son fils. Or, le jeune homme – qui vivait dans la rue au moment du meurtre – voulait y habiter. Selon deux témoins, Jérémie Fortier-Grenier disait ouvertement qu’il allait obtenir le chalet en héritage, voire que son père était mort à la guerre.

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Jérémie Fortier-Grenier, accusé du meurtre de son père Richard Grenier

« Ce soir-là, il m’a dit qu’il aurait préféré avoir un fils avec qui il n’aurait pas fait les erreurs du passé », raconte l’accusé en pleurant. Richard Grenier venait d’avoir un autre fils avec sa nouvelle conjointe. Celle-ci était d’ailleurs un « poison » aux yeux du jeune homme.

Le crime planifié depuis « une semaine »

Depuis déjà « une semaine », Jérémie Fortier-Grenier planifiait son crime. Pendant leur discussion dans le véhicule de son père, il garde donc son couteau à portée de main, caché sur le côté. Lorsqu’il dit à son père qu’il l’aime et tente de lui faire une « caresse », son père recule. « Je voulais seulement lui faire comprendre », sanglote-t-il.

C’en est trop pour le jeune homme. Il donne le premier coup de couteau. Selon son récit, son père se débat et tente de reprendre le contrôle de l’arme pour s’attaquer à son assaillant. « Crève, mon ostie », lance le père, pendant la bataille. « C’est là que ça a commencé », ajoute Jérémie Fortier-Grenier, sans plus de détails. L’enquêteur n’interrogera toutefois pas davantage le suspect sur ces secondes critiques.

Jérémie Fortier-Grenier a ensuite pris le véhicule de son père et s’est rendu au chalet. Là-bas, le jeune homme prend le temps de mettre une chaloupe à l’eau. « Je voulais me préparer pour la saison », explique-t-il.

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Chalet de Richard Grenier près de Mont-Laurier

Après le meurtre, l’accusé écrit un message à son père pour « faire comme si de rien n’était ». « S’il y a quoi que ce soit, je suis là n’importe quand. Je t’aime papa. On se revoit bientôt. N’oublie pas de me dire quand tu arrives à la maison », indique-t-il.

Le procès se poursuit vendredi au palais de justice de Montréal.