(Toronto) Dix compagnies saoudiennes ont lancé des poursuites au Canada contre un ancien responsable du contre-espionnage exilé en Ontario, qu’elles accusent d’avoir détourné plusieurs milliards de dollars, selon des documents consultés vendredi par l’AFP.

Ces sociétés appartenant au conglomérat Tahakom Investment, une filiale du fonds souverain public d’Arabie saoudite, ont engagé devant la Cour supérieure de l’Ontario une procédure visant Saad Aljabri, qui vit en exil dans la région de Toronto.

M. Aljabri a été limogé en 2015 de son poste de responsable du contre-espionnage au ministère saoudien de l’Intérieur. Proche du prince Mohammed ben Nayef, il a fui le royaume en 2017 lorsque celui-ci a été évincé du pouvoir au profit de Mohammed ben Salmane (MBS).

Ces sociétés accusent l’ancien chef espion d’avoir commis une « fraude massive » d’un montant total d’au moins 3,47 milliards de dollars américains.

Le tribunal canadien a ordonné un gel des avoirs mondiaux de M. Aljabri, selon ces mêmes documents.

Les auteurs de la poursuite accusent M. Aljabri d’avoir détourné à son profit personnel ou pour ses proches des sommes importantes au détriment de sociétés saoudiennes impliquées dans la lutte antiterroriste.

Ils ont transmis à la justice canadienne une liste de « biens mal acquis » incluant des propriétés en Arabie saoudite, au Canada ou des appartements de luxe à Boston, aux États-Unis.

Les soutiens de Saad Aljabri ont pour leur part promis, dans un communiqué, de « combattre vigoureusement ces allégations de corruption recyclées » qui visent selon eux à détourner l’attention de la « brutalité » du prince héritier Mohammed ben Salmane.

En août dernier, M. Aljabri avait accusé devant un tribunal américain « MBS » d’avoir envoyé au Canada une équipe d’agents chargés de l’éliminer fin 2018, peu après le meurtre en Turquie du journaliste critique Jamal Khashoggi.

Selon ses dires, 13 jours après l’assassinat de M. Khashoggi, le 2 octobre 2018, une équipe de « mercenaires personnels » du prince héritier a été refoulée à son arrivée au Canada.

Il affirme que le groupe comprenait des experts en médecine légale et des équipements similaires à ceux du groupe accusé d’avoir étranglé puis découpé en morceaux le corps du journaliste dans le consulat saoudien à Istanbul.