Nick Marois n’avait jamais patrouillé seul de sa carrière jusqu’au 10 mai 2018. Ce soir-là, le jeune agent de sécurité est tombé nez à nez sur un homme qui venait vraisemblablement de tuer son propre père dans le stationnement d’une usine de Montréal.

« J’ai eu un mauvais feeling de A à Z », a-t-il confié au jury jeudi au procès pour meurtre au premier degré de Jérémie Fortier-Grenier. L’accusé de 26 ans aurait attiré son père dans un guet-apens dans un stationnement désert, où il l’aurait poignardé à 32 reprises avant de se débarrasser du corps dans un boisé adjacent. Le fils venait tout juste de renouer avec son père dans un contexte familial difficile.

Nick Marois aurait été témoin – du moins en partie – de ces tragiques évènements. Le jeune homme de 24 ans a ainsi découvert à l’aube le corps de Richard Grenier, caché sous un tapis et des roches, à quelques mètres du stationnement d’une usine du TechnoParc à Saint-Laurent.

Le jeune agent de sécurité patrouille sur l’avenue Marie-Curie ce soir-là, lorsqu’il aperçoit un véhicule dans un stationnement censé être désert. Il interpelle un homme qui lui explique travailler de nuit. La conversation s’arrête là, mais quelque chose cloche, selon le témoin.

« L’individu était super stressé. J’ai remarqué ses mains dans son dos. Je n’ai jamais vu ses mains. Ce qui m’a frappé : il avait la gorge toute rouge. Quelque chose ne me semblait pas normal », raconte Nick Marois. En contre-interrogatoire, le témoin précise : la gorge de l’individu était plutôt « rouge mauve », comme s’il s’était fait « prendre à la gorge ».

Alerte, l’agent de sécurité garde un œil sur l’homme suspect en le surveillant de loin tout en continuant ses rondes. Il le voit alors sortir « quelque chose de lourd, un genre de poche de hockey », de son véhicule. Plus tard, il revoit le même homme sortir du boisé, les mains vides. Lorsque le mystérieux inconnu quitte les lieux, Nick Marois décide de le suivre pour noter sa plaque d’immatriculation.

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Le corps de la victime a été retrouvé caché sous un tapis dans ce boisé.

Toute la nuit, le jeune agent a « trop peur pour sortir » de son véhicule et patiente jusqu’à l’aube pour pénétrer dans le boisé. « J’ai vu un homme dans le fossé. J’étais en état de choc, j’ai été bouleversé par la situation. Ç’a été mon dernier shift », a-t-il conclu.

Selon la Couronne, après avoir tué son père, Jérémie Fortier-Grenier s’est rendu à un chalet de Mont-Laurier. Or, sa copine et la mère de celle-ci étaient déjà là pour lui faire une surprise. L’accusé avait alors les mains et les vêtements tachés de rouge.

Jérémie Fortier-Grenier aurait attiré son père dans ce stationnement en prétextant avoir besoin de son aide pour récupérer ses bottes à son travail, avance la poursuite. Or, l’ancien superviseur de l’accusé a expliqué jeudi que Jérémie Fortier-Grenier avait perdu son emploi à la mi-avril 2018 à la suite d’un « incident ». Aucune paire de bottes n’a été retrouvée dans son casier.

Jérémie Fortier-Grenier est défendu par MMartin Latour et MSabrina Lapolla, alors que MNadia Bérubé et MClaudine Charest représentent le ministère public. Le procès est présidé par le juge Claude Champagne.