(Québec) Choqué par la multiplication des vidéos d’arrestations violentes dans sa ville, le maire de Québec estime qu’« il y a un problème » avec un ou des policiers du SPVQ.

« Chaque vidéo est insupportable, autant la première que la dernière », a lancé jeudi Bruno Marchand lors d’une mêlée de presse.

« On s’attend à ce que la police soit là pour protéger le monde, le traiter avec respect. Si des gens n’ont pas compris ça, le chef de police va devoir remédier à la situation », a déclaré le maire, qui semble avoir monté le ton.

PHOTO FOURNIE PAR JEAN-PHILIPPE ST-LAURENT

Jean-Philippe St-Laurent dit avoir été victime d’une arrestation violente au restaurant Portofino, vendredi dernier.

Trois vidéos d’interventions musclées qui mettent en scène un même policier ont fait surface dans les derniers jours. Jeudi, une autre vidéo qui montre une arrestation violente au bar District Saint-Joseph a aussi été publiée par Le Journal de Québec. On y voit un policier qui ressemble à celui des trois autres vidéos.

« La force de la preuve démontre qu’il y a un problème avec certainement un ou quelques policiers, qui au final nuit à l’ensemble de l’image [de la police] », a laissé tomber Bruno Marchand.

Depuis le week-end dernier, des images d’interventions violentes au bar Le Dagobert, au Portofino, sur la Grande Allée et au District Saint-Joseph ont été diffusées. Le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) a suspendu cinq policiers.

Le chef du SPVQ, Denis Turcotte, a confirmé jeudi qu’un policier figurait dans les trois premières vidéos. Lors d’une conférence de presse très courue par les médias, il n’a pas été en mesure de dire si ce policier était celui qu’on voyait pousser violemment un homme au District.

« La suspension des policiers cette semaine a créé une onde de choc au niveau de la population, des médias et à l’intérieur du service de police aussi, relate le chef. Ce ne sont pas de belles journées. »

« Ce n’est pas élégant »

Denis Turcotte n’a pas voulu condamner jeudi les policiers en action dans ces vidéos. Il faut selon lui attendre les enquêtes disciplinaires du SPVQ et les enquêtes externes du Commissaire à la déontologie policière.

Le chef n’a pas voulu non plus condamner la scène où un policier envoie de la neige au visage d’un jeune homme de 18 ans, alors que ce dernier est plaqué au sol.

« Si vous, vous êtes capables de dire qu’il était maîtrisé au sol, c’est peut-être un point de vue que vous avez. Moi je dois établir s’il était maîtrisé ou en processus d’être maîtrisé. Je ne suis pas rendu là encore, mais on travaille là-dessus. »

Quant à ces images où on entend un policier dire à un homme : « Veux-tu que je te gaze, mon ostie ? », avant de le pousser violemment, le chef admet que « ce n’est pas élégant ».

« S’il y a des manquements déontologiques ou disciplinaires, il y aura des sanctions », assure-t-il.

PHOTO YAN DOUBLET, LE SOLEIL

Le chef du SPVQ a convoqué les médias jeudi pour réagir aux nouvelles vidéos d’interventions musclées.

Denis Turcotte n’avait aucune annonce à faire jeudi. Il réitère qu’il entend aller au fond des choses, que les enquêtes seront menées rondement et que le SPVQ va collaborer avec le Commissaire à la déontologie policière, qui enquête sur les évènements du Dagobert et du Portofino.

Il a défendu le travail de l’unité GRIPP, au cœur de la tourmente et à laquelle appartiennent les cinq policiers suspendus. « Le travail de cette unité fait en sorte que nous tous, moi, ma famille, vos familles, puissions marcher librement en ville et aller dans les endroits licenciés en toute sécurité », a-t-il dit, à propos de cette escouade qui patrouille dans les bars et les restaurants.

Mais il a ouvert la porte à la possibilité de « revoir le mandat » de cette unité. « Est-ce qu’on est encore dans les bonnes pratiques ? Est-ce qu’on est encore dans la mission d’origine ? On va faire en sorte qu’on mette en place les bonnes pratiques. »

M. Turcotte est aussi revenu sur l’absence de policiers noirs à Québec. « On a des minorités ethniques, visibles. Mais tout le monde dit qu’on n’a pas de Noir. Le seul Noir qu’on a eu, c’était dans les années 90 et il a fait le choix d’aller travailler dans la région de Montréal », a-t-il dit.

Le chef de police voulait manifestement aussi s’adresser à ses quelque 850 policiers. « Je réitère toute ma confiance envers mes troupes. Notre ville est l’une des villes les plus sécuritaires au monde, et ça, c’est grâce à vous, chers collègues. »

Le maire a aussi invité la population à ne pas mettre tous les policiers dans le même panier.

« Il y a plus de 800 policiers à Québec, a dit Bruno Marchand, alors ça n’en prend pas un grand nombre pour entacher l’ensemble de l’œuvre de tous les policiers. C’est ce qu’on voit dans les vidéos. »

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse