« Cette femme a anéanti nos vies. Nous n’aurons jamais la chance de dire au revoir à Vincenzo et Giuseppe. Je n’ai pas de corps sur lequel je peux pleurer », a confié l’ex-conjointe de l’un des deux frères assassinés. Les observations sur la peine de Marie-Josée Viau ont été marquées mercredi par les témoignages émouvants de plusieurs membres de la famille Falduto.

Marie-Josée Viau a été reconnue coupable par un jury le mois dernier de complot et des meurtres au 2e degré des frères Vincenzo et Giuseppe Falduto. Les deux hommes, reliés à la mafia selon la preuve, ont été tués par un tueur à gages le 30 juin 2016 dans le garage de la propriété de Marie-Josée Viau et de Guy Dion près de Saint-Hyacinthe.

Marie-Josée Viau est déjà assurée d’être condamnée à la prison à perpétuité. Il reste ainsi au juge Éric Downs de déterminer la période d’inadmissibilité à la libération conditionnelle. La Couronne a réclamé mercredi une période de 15 à 17 ans, alors que la défense a demandé le minimum de 10 ans, soit la recommandation faite par le jury lors du prononcé du verdict.

La théorie de la Poursuite voulait que Viau et Dion étaient au courant que les meurtres seraient commis sur leur propriété ce jour-là et qu’ils ont ensuite brûlé les corps à ciel ouvert avant de faire disparaître toute trace du crime, ce que les deux accusés ont nié sous serment durant leur témoignage.

Le fait que les corps n’ont jamais pu être retrouvés a été déploré dans tous les témoignages des membres de la famille Falduto lus et entendus mercredi matin.

« Madame Viau a volé notre famille de plusieurs façons.

Nous n’avons pas de cimetière à visiter. Elle n’a pas eu assez de cœur pour au moins nous laisser les corps pour nous permettre d’avoir la paix. Elle les a fait disparaitre comme s’ils n’avaient jamais existé. Une mère qui fait cela, ça devrait faire peur à tout le monde. Elle nous a détruits au point où nous n’avons pas de mots pour expliquer les dommages. Elle n’a exprimé aucun remords.

Nous avons hérité d’une peine de misère à vie », ont écrit le frère et la sœur des victimes.

« Comment a-t-elle pu faire des actions aussi cruelles sur deux enfants ? Je me demande si Mme Viau a un cœur et une conscience », a renchéri leur mère.

En entendant ces mots, et ceux des autres témoins, Marie-Josée a fondu en larmes.

Absence de remords

« L’accusée, par ses comportements post délictuels, a empêché qu’une enquête policière puisse se tenir en temps opportun et a fait en sorte que la famille a été dans le noir durant trois ans.

Elle a empêché la famille d’avoir des dépouilles à enterrer et d’avoir un lieu pour se recueillir », a aussi repris la procureure de la Poursuite, MIsabelle Poulin.

Dans les facteurs aggravants, la procureure a également relevé la gravité des crimes commis, le contexte de crime organisé, le fait que Marie-Josée Viau ait caché des armes pour la mafia et son absence de remords.

« Elle aura eu l’occasion de démontrer de l’empathie, mais elle ne l’a pas fait. C’est une autre personne qui le fait dans une lettre. Ça tombe un peu court, ça sonne creux et c’est un peu tard. La première étape, c’est d’admettre les faits et on est loin de là. Il n’y a pas de processus de réhabilitation d’amorcé et pas de prise de conscience », a ajouté MPoulin.

Un rôle secondaire, selon la défense

L’avocate de la défense a fait valoir que Marie-Josée Viau a joué un rôle « secondaire » dans cette affaire. « Mme Viau n’est pas l’initiatrice du complot ni l’auteur des meurtres », a insisté MMylène Lareau. De plus, si Marie-Josée Viau n’avait pas été impliquée, les deux victimes auraient tout de même été assassinées par le tireur, a fait valoir la défense.

MLareau a également souligné que l’auteur du meurtre – dont l’identité ne peut être révélée – profite d’une liberté complète, contrairement à sa cliente. « Le meurtrier est aujourd’hui libre. Il est totalement libre. Il n’a pas non plus de réhabilitation envisageable. Il n’a pas eu d’accusation. Il va recevoir plus de 450 000 $. C’est un élément que vous devriez considérer », a plaidé MLareau.

À la fin de l’audience, Marie-Josée Viau a brièvement pris la parole. En pleurs, elle s’est dite « sincèrement désolée ». Ses autres paroles étaient toutefois inaudibles en raison de ses sanglots.

Viau et Dion avaient été arrêtés à l’automne 2019, après que le tueur à gages qui a tué les Falduto se soit mis à collaborer avec la Sûreté du Québec et à enregistrer le couple, à son insu.

À l’origine, Marie-Josée Viau et Guy Dion étaient accusés de complot et des meurtres au premier degré des frères Falduto. Guy Dion a été déclaré non coupable sur tous les chefs par le jury.

Dans les heures qui ont suivi leur arrestation, Marie-Josée Viau et Guy Dion ont fait des aveux aux enquêteurs qui ont toutefois été déclarés inadmissibles par le juge Éric Downs de la Cour supérieure, car, entre autres, le magistrat a noté des violations de la Charte, de la Common law et du droit à l’avocat.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.