Les deux inspecteurs de la Société de transport de Montréal (STM) qui avaient été impliqués dans l’arrestation musclée d’une femme noire dans le métro, en avril, « étaient justifiés à user de la force », conclut un expert indépendant, qui émet toutefois plusieurs recommandations.

« Après avoir considéré l’ensemble des circonstances, je conclus que les inspecteurs impliqués dans l’évènement étaient justifiés à user de la force et que cette force était raisonnable », écrit l’avocat en déontologie policière, Marco Gaggino, dans son rapport rendu public mardi soir. Il y reconnaît toutefois que la scène « a de quoi troubler, voire choquer ».

C’est au métro Jean-Talon, mi-avril, que l’évènement s’était produit. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, on y voit deux inspecteurs de la STM qui tentent de maîtriser une femme noire sur le quai de la station. L’un des agents frappe à plusieurs reprises cette personne, qui crie et se débat, tandis que des passants tentent de s’interposer.

À l’époque, l’affaire avait fait le tour du web. Les images avaient été qualifiées de « troublantes » par la mairesse Valérie Plante. La STM avait alors mandaté MGaggino pour « répondre aux préoccupations exprimées par le public ».

Dans son rapport, le juriste note d’emblée que rien ne permet de conclure que du profilage racial serait à l’origine de l’intervention. Au contraire, affirme-t-il, « l’ensemble des gestes posés reposait sur des motifs purement objectifs ».

Une idée de la séquence

La femme a d’abord été interpellée puisqu’elle avait « enjambé un tourniquet donnant accès au métro » sans avoir payé. Les caméras de surveillance internes montrent alors « une interaction entre les inspecteurs et ce sujet d’une durée approximative de 17 minutes », note MGaggino. « Durant cette période, on voit ces personnes discuter et à nul endroit l’on ne voit des gestes agressifs ou inappropriés. La seule force utilisée durant ce temps est légère, soit pour escorter le sujet vers un mur. »

C’est alors qu’elle aurait « fui la garde des inspecteurs en courant vers le quai du métro ». « La poursuite et la maîtrise du sujet étaient les seules options disponibles dans les circonstances vu le danger de blessures graves ou de décès que constituait la proximité de la voie de métro », selon l’avis de l’avocat.

Pendant l’intervention, des coups ont été portés à la femme afin de la maîtriser. Cette dernière aurait à son tour mordu l’un des deux inspecteurs à la cuisse. L’employé de la STM a dû être hospitalisé après les faits.

Caméras corporelles ?

Même s’il ne blâme pas les inspecteurs, l’avocat recommande à la STM de « revoir la couverture de ses caméras internes dans le métro » afin de s’assurer qu’il n’y ait pas « d’angles morts » dans des lieux où les inspecteurs sont susceptibles d’intervenir. Il suggère aussi que la société considère sérieusement « de fournir aux inspecteurs des caméras corporelles, avec capacité audio ».

On lit aussi qu’il serait judicieux que le transporteur offre à ses inspecteurs « une formation théorique et pratique sur la poursuite à pied, adaptée à la réalité de la STM pour les interventions souterraines ». « Cette formation devrait notamment comporter des balises permettant à l’inspecteur d’évaluer si une poursuite à pied est justifiée, sécuritaire et proportionnelle aux circonstances », avance le juriste.

« Nous prenons acte de ce rapport externe et nous en analyserons les trois recommandations, tant au plan de nos processus que des meilleures pratiques en vigueur dans l’industrie de la sécurité des services de transports publics », a promis à ce sujet le directeur général de la STM, Luc Tremblay.

Avec Isabelle Ducas