Un homme condamné à la prison à vie pour avoir tué son père de 82 ans à coups de marteau au sous-sol familial à Châteauguay en 2013 aura droit à un nouveau procès, a tranché mercredi la Cour d’appel. Sachant que la victime a frappé son fils avec une massue, puis l’a menacé de mort, la défense de provocation aurait dû être présentée au jury.

Quatre ans après son arrestation, Marc Lefebvre avait été reconnu coupable par un jury en février 2017 du meurtre non prémédité de son père, Henri Lefebvre. L’homme de 61 ans avait été condamné par le juge Pierre Labrie à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 13 ans au palais de justice de Salaberry-de-Valleyfield.

Les circonstances du meurtre sont particulièrement violentes. Ce jour-là, Marc Lefebvre et son père Henri sont seuls dans la maison familiale de Châteauguay. L’accusé se rend au sous-sol, lorsqu’il entend son père parler tout seul le matin. C’est alors que l’octogénaire court subitement vers son fils pour lui donner des coups de masse au poignet et à la joue.

Pendant cette première altercation, Marc Lefebvre repousse son père, qui tombe de reculons. Les deux hommes s’échangent des coups de pied et des coups de poing, alors que l’accusé tente d’empoigner la masse. Dans la bagarre, la masse « tombe sur la tête » du père qui s’effondre au sol.

Sur le point de s’évanouir, Marc Lefebvre s’assoit dans un fauteuil, alors que son père repose au sol, la respiration difficile. « Soudainement, [Henri Lefebvre] se redresse, prend la masse à ses côtés, la soulève et dit : “Marc, je vais te tuer” », résume la Cour d’appel.

L’accusé court jusqu’à l’établi pour prendre un marteau, puis assène un coup avec l’outil au menton de son père. Il donne ensuite un deuxième coup au thorax. Son père s’écroule. Marc Lefebvre se met à pleurer et décide d’attendre le retour de sa sœur. Il nettoie toutefois la scène et emballe le corps de son père dans des sacs de plastique. L’accusé prend même le temps de souper avec sa sœur sans lui parler de la mort de leur père.

Toute la preuve est toutefois à refaire dans ce dossier. Selon la Cour d’appel du Québec, le juge aurait dû ouvrir au jury la défense de provocation, même si l’avocat de l’accusé n’en avait pas fait la demande. La victime aurait en effet menacé de tuer son fils pendant la bagarre, une action « susceptible de priver une personne raisonnable de sa capacité à se maîtriser ». Précisons qu’il ne faut pas confondre la défense de provocation à celle de légitime défense.

Selon un psychiatre, Marc Lefebvre présentait des traits de personnalité schizoïde. Il exprimait difficilement ses émotions et avait tendance à éviter les conflits. Il percevait son père comme imprévisible et potentiellement dangereux. L’opinion du psychiatre atteste « indubitablement » de la position de l’accusé selon laquelle il a réagi soudainement au moment fatidique, indique la Cour d’appel.

Dans le cas présent, l’absence de défense de provocation excluait le verdict d’homicide involontaire. Or, le jury aurait peut-être pu écarter la légitime défense de Marc Lefebvre, mais tout de même avoir un doute raisonnable fondé sur la provocation. C’est pourquoi un nouveau procès s’avère nécessaire.

MMarie-Hélène Giroux défend l’accusé, alors que MPatrick Cardinal représente le ministère public.