(Joliette) Le féminicide de Jaël Cantin, cette mère de six enfants tuée par son conjoint, a plongé dans un douloureux deuil sa grande famille « tissée serré ». Presque deux ans plus tard, ils ont pu faire partager leur souffrance et rendre hommage à leur Jaël, alors que son bourreau, Benoit Cardinal, a été condamné à la prison à vie.

« Tu seras toujours ma fille et la meilleure maman du monde. Tu vas continuer à vivre à travers tes six merveilleux enfants. Tu es partie trop vite, à 33 ans », a confié Lynda Hethrington, mère de Jaël, dans une poignante lettre lue mercredi au palais de justice de Joliette, lors du prononcé de la peine de Benoit Cardinal.

Cousines, tante, amies et parents se sont donc confiés à la juge Johanne St-Gelais pendant cette audience particulièrement émouvante. Un exercice réparateur pour une famille éprouvée. Reconnu coupable du meurtre au premier degré de sa conjointe Jaël Cantin en mai dernier, l’homme de 35 ans a été condamné à la prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Il a toutefois fait appel du verdict.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE JAËL CANTIN

Jaël Cantin

« Il s’agit d’un évènement violent, tragique et malheureux, dont on ne peut à ce jour mesurer l’impact pour tous ceux et celles impliqués dans cet évènement », a affirmé la juge St-Gelais, en soulignant le contexte conjugal du meurtre. La juge a tenu à souligner le « très grand dévouement et la résilience » des proches de Jaël Cantin pour permettre à ses enfants de reprendre une vie normale. « Vous ne portez aucune responsabilité dans l’évènement tragique », a-t-elle rappelé.

Benoit Cardinal a assassiné sa conjointe, le 15 janvier 2020, en lui causant des blessures mortelles à la tête. Plusieurs mineurs se trouvaient dans la maison au moment du meurtre. À cette époque, l’accusé avait des problèmes financiers. Il avait perdu son emploi d’éducateur au Centre jeunesse de Laval tout juste avant le meurtre.

Selon la preuve présentée au procès, Benoit Cardinal avait confié à une adolescente son plan pour tuer Jaël Cantin de trois façons et camoufler son crime. Il aurait d’ailleurs eu des relations sexuelles avec cette adolescente rencontrée au centre jeunesse, et ce, « quasiment tous les jours » jusqu’à son congédiement.

« Elle était une superwoman »

Depuis le drame, Gaétan Cantin, le père de Jaël, vit un vrai cauchemar. Parfois incapable de travailler, il souffre de maux de tête persistants et d’un manque de concentration. C’est dans leur maison intergénérationnelle de Mascouche que Benoit Cardinal a fauché la vie de sa fille.

« Il nous aura floués, trompés, sans même prononcer un mot pour sa défense au cours du cheminement juridique », a-t-il déploré.

Comment ai-je pu laisser entrer sous notre toit le destructeur de nos vies ?

Gaétan Cantin, père de la victime

Gaétan Cantin n’a toutefois pas hésité à interroger l’accusé dans le box. « Pourrais-tu maintenant penser à tes enfants et mettre fin à toutes ces procédures juridiques ? », l’a-t-il sommé. « Maintenant, vivons. Vivre, comme Jaël nous l’avait si bien enseigné. De toute façon, Jaël est là-haut pour nous guider », a conclu sur une note d’espoir le père endeuillé.

« Pourquoi ? » C’est ce que se répète sans cesse Lynda Hethrington, qui souffre de pertes de mémoire et d’anxiété depuis la tragédie. « Je suis hantée par le drame, la colère, mais je dois rester forte pour mes six petits-enfants. Pourquoi ? Pourquoi avoir fait subir ça à ces enfants ? Personne n’a le droit de se faire justice. C’est mon cœur de maman, brisé, laissé, meurtri. Ma fille Jaël n’est plus là », lâche-t-elle, dans la lettre lue par la procureure de la Couronne, MCaroline Buist.

« Jaël était un modèle de femme, de mère. Elle était une superwoman. Sa mort est une tragédie en soi. Son meurtre n’avait pas lieu d’être. Ça m’a détruite », a confié à la cour Marie-France Pagé, une amie proche de Jaël Cantin.

« C’est un trauma qui accompagne chaque membre de la famille. Il y a des jours où la douleur poignarde à nouveau. Un traumatisme, ça ne quitte jamais nos vies. […] Jaël vivait pour l’amour, pour la famille, pour ses enfants. Ça m’affecte énormément qu’elle ne soit pas là pour les voir grandir », a confié Allison Hethrington, une cousine de Jaël Cantin.

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Nombre d’adolescentes que Benoit Cardinal est soupçonné d’avoir agressées sexuellement au centre jeunesse où il travaillait