Une troisième femme intente une poursuite civile contre Gilbert Rozon en l’accusant de l’avoir violée il y a 33 ans, lors d’une fête à son domicile.

Il s’agit de la comédienne Danie Frenette, qui réclame 2,2 millions de dollars au fondateur de Juste pour rire.

Les faits se seraient produits à Outremont en juillet 1988. Selon la poursuite, déposée vendredi au palais de justice de Montréal, Gilbert Rozon aurait amené Mme Frenette à l’écart des autres invités, dans la cour de sa maison, pendant la fête, et l’aurait violée derrière des buissons, malgré le fait qu’elle lui ait dit non à plusieurs reprises.

« Gilbert, arrête, qu’est-ce que tu fais là ? Pourquoi tu fais ça ? Arrête, arrête, non, arrête ! Non ! », aurait protesté Danie Frenette qui, paralysée par la honte, n’aurait pas réussi à se débattre.

« Survivante de bombardement »

« La demanderesse est alors en état de choc. Elle se sent comme une survivante de bombardement. Elle n’a qu’une idée en tête : quitter les lieux et rentrer chez elle », peut-on lire dans la poursuite.

La plaignante, maintenant âgée de 66 ans, a gardé le silence sur ces évènements à l’époque parce qu’elle travaillait pour Gilbert Rozon et ne voulait pas perdre son emploi, explique la poursuite.

« Elle pensait que personne ne la croirait. Le défendeur lui semblait intouchable : il avait la gloire, la richesse et des amis influents, alors qu’elle commençait dans le milieu et n’avait aucun moyen de se défendre », souligne la poursuite.

Profitant de son silence, Gilbert Rozon l’aurait harcelée au cours des mois suivants et l’aurait même violée une seconde fois.

Les documents judiciaires indiquent que Mme Frenette, qui est aujourd’hui directrice de l’École de théâtre du vieux Saint-Eustache, a souffert de dépression, d’anxiété, de vertiges et de crises de panique à la suite des agressions sexuelles qu’elle a subies. Ces troubles auraient nui à sa carrière.

C’est pour cette raison qu’elle réclame 1,2 million de dollars en dommages compensatoires et 1 million en dommages punitifs.

Plainte à la police rejetée

Ce n’est qu’en 2017 que Danie Frenette a dénoncé publiquement les agissements de Gilbert Rozon, lors de la vague déclenchée par le mouvement #moiaussi. Elle a aussi porté plainte au Service de police de la Ville de Montréal, tout comme 13 autres femmes, mais sa plainte n’a pas été retenue.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) n’a finalement retenu qu’une seule plainte, soit celle de viol et attentat à la pudeur à l’endroit d’Annick Charette, pour des évènements qui se seraient produits en 1980.

Dans cette affaire, M. Rozon a été acquitté le 15 décembre 2020.

Deux autres femmes poursuivent au civil Gilbert Rozon pour des agressions sexuelles alléguées : la comédienne Patricia Tulasne a déposé une poursuite en avril pour 1,6 million et la réalisatrice Lyne Charlebois a déposé un recours semblable le 6 mai dernier pour 1,7 million.

Les trois femmes sont représentées par le même cabinet d’avocats, Trudel Johnston & Lespérance.

Elles font toutes les trois partie du collectif Les Courageuses, qui a déposé en novembre 2017 une demande pour obtenir l’autorisation d’exercer une action collective visant à représenter toutes les personnes qui auraient été agressées ou harcelées sexuellement par M. Rozon. Cette demande a été rejetée par la Cour suprême du Canada le 16 novembre 2020.