(Fredericton) Le jury au procès de Matthew Raymond l’a trouvé non criminellement responsable des quatre meurtres perpétrés à Fredericton, le 10 août 2018, en raison d’un trouble de santé mentale.

Les 11 jurés sont parvenus à ce verdict après trois jours de délibérations, à l’issue d’un procès de neuf semaines qui a ravivé de douloureux souvenirs dans la capitale du Nouveau-Brunswick, une ville connue pour sa tranquillité et son faible taux de criminalité.

Les proches des victimes se sont pris dans leurs bras en sanglotant après l’annonce du verdict, vendredi. Matthew Raymond a pour sa part baissé la tête et essuyé ses larmes en gardant le silence.

Les quatre personnes abattues le 10 août 2018 ont laissé plusieurs membres de leur famille dans le deuil, et une ville sous le choc. « Nos cœurs sont brisés », avait déclaré le maire Mike O’Brien au moment de a tragédie.

Le drame compte parmi trois tueries qui ont secoué les Maritimes dans les dernières années. En 2014, un tireur a tué deux agents de la Gendarmerie royale du Canada et en a blessé deux autres à Moncton. Puis, au mois d’avril dernier, la Nouvelle-Écosse a été le théâtre de la pire tuerie de l’histoire du pays, avec 22 morts et trois blessés.

Les agents du service de police de Fredericton qui ont perdu la vie aux mains de Matthew Raymond sont Robb Costello, 45 ans, père de quatre enfants, et Sara Burns, 43 ans, mère de trois enfants. Ils étaient les premiers policiers arrivés sur la scène et ils ont été blessés par balle au moment où ils se portaient au secours de deux victimes gisant au sol.

Ces dernières avaient apparemment déjà perdu la vie à leur arrivée. Bobbie Lee Wright, 32 ans, surnommée Bubbles, et Donnie Robichaud, 42 ans, ont été abattus dans le stationnement d’un immeuble à logements.

Ils venaient de commencer à se fréquenter et, selon un proche, ils se préparaient à une sortie en tyrolienne.

Des autopsies présentées au procès révèlent que les victimes ont toutes été atteintes au moins une fois à la tête.

Des policiers ont témoigné au procès que les tirs provenaient de la fenêtre de l’appartement de Matthew Raymond, au troisième étage de l’immeuble.

Il a été atteint par balle à l’abdomen avant que des policiers ne le mettent en état d’arrestation. Il s’est complètement remis de sa blessure.

Les policiers disent avoir saisi une carabine semi-automatique SKS et un fusil de chasse, de même qu’environ 2000 cartouches et un couteau dans son appartement.

Il ne faisait aucun doute que Matthew Raymond était le tireur. La question sur laquelle le jury devait se pencher concernait plutôt son état mental.

Au cours du procès, des saisies d’écran de son ordinateur et d’autres éléments trouvés dans son appartement ont révélé son immersion dans les théories du complot, les canulars, les convictions relieuses sur la fin des temps et la numérologie. Dans les mois précédant la tuerie, sa détérioration mentale a été marquée par des croyances étranges sur des démons se faisant passer pour des dirigeants politiques et des célébrités, sur la terre plate et sur une apocalypse imminente.

Deux psychiatres ont indiqué au jury que Matthew Raymond avait un trouble de santé mentale : l’un a dit qu’il s’agissait de schizophrénie et l’autre, d’un trouble délirant.

Le juge ainsi que l’avocat principal de la défense ont indiqué aux jurés que s’ils trouvaient l’accusé non criminellement responsable, il serait emprisonné dans un établissement médical rattaché à un pénitencier.

« Nous ne parlons pas de le relâcher », a souligné Me Nathan Gorham, en expliquant qu’il serait interné indéfiniment et soumis à des évaluations régulières de son état mental.

La défense a soutenu que Matthew Raymond était incapable de comprendre la nature de ses actes. Les procureurs de la Couronne ont objecté que ses délires allaient et venaient, sans être suffisamment intenses pour l’empêcher de réaliser qu’il ouvrait le feu sur des personnes et que c’était mal.

La province a déclaré qu’il s’agissait du premier procès devant jury à se tenir au Canada depuis le début de la pandémie de COVID-19. Il s’est déroulé dans un centre de congrès du centre-ville, avec des sièges largement espacés. Seuls les membres des médias et les proches des victimes ont été autorisés à assister aux procédures.