« Vous êtes les chiens de garde contre l’infiltration du crime organisé », a lancé la procureure de la Régie des alcools, des courses et des jeux, MJoliane Pilon, aux régisseurs de la RACJ qui écoutent depuis la semaine dernière la cause de New Era Fighting & Promotion.

Son président, le boxeur Yan Pellerin, demande un permis pour organiser des combats ou des galas de boxe, comme GYM ou Eye of the Tiger Management, mais ses liens passés et actuels avec des individus liés aux Hells Angels sont venus le hanter.

Un certain Daniel Fontaine, condamné pour possession d’une grande quantité de stéroïdes en 2017 et ayant des liens contemporains avec des proches des Hells Angels, est dans l’entourage de Pellerin et son nom a souvent été prononcé dans la salle d’audience ces derniers jours.

« Le nom de Fontaine n’apparait pas dans New Era, mais c’est normal, car s’il avait été là, on aurait aujourd’hui des reproches encore plus grands. C’est comme ça, qu’ils [le crime organisé] fonctionnent. Ils ne les mettent pas comme administrateurs et leur nom n’apparait nulle part ».

« Même si on est loin de la situation des années 80, ce sont des préoccupations constantes. Il faut fermer la porte au crime organisé et demeurer sévère. Le milieu des sports de combat va rester vulnérable et un moyen qu’on a, c’est de refuser les permis. Si la Régie n’use pas de son pouvoir, elle ouvre une porte au crime organisé », a ajouté la procureure, qui a également souligné la présence de Pellerin à des événements des Hells Angels en 2004, 2005 et 2009.

« Ce n’est pas n’importe qui qui peut être invité aux fêtes et au golf. M. Pellerin a tenté de minimiser sa présence. Il a eu des liens étroits avec Steve Duquette [un Hells Angels]. Il dit qu’il était son partenaire d’entrainement sans plus, pourtant ils ont eu une longue relation ».

« Avec sa sympathie pour le crime organisé, est-ce que monsieur et madame tout le monde croirait que M. Pellerin ne nuirait pas au bon renom du sport ? », a demandé la procureure.

Enquête mise à mal

De leur côté, les avocats du boxeur ont rapidement évacué la question de la présence de Fontaine dans l’entourage de Pellerin en disant qu’il n’avait aucun lien avec New Era Fighting & Promotion.

Ils ont principalement choisi d’attaquer l’enquête d’habilitation sécuritaire faite par la Sûreté du Québec sur leur client. Cette enquête, réalisée par un analyste investigateur de la SQ, a notamment établi qu’il y aurait eu des liens entre le gym de l’homme fort Hugo Girard, ancien investisseur de New Era, et une ancienne école de boxe, Pro Boxe, dans laquelle auraient été impliqués un membre des Hells Angels, Claude Pépin, et des membres d’un de leurs anciens clubs subalternes.

Or, les avocats de Pellerin affirment que les deux établissements n’avaient pas la même adresse sur la rue Saint-Jacques à Saint-Jean-sur-Richelieu, et qu’il n’y a jamais eu de liens entre Hugo Girard et ces individus liés aux Hells Angels.

« L’enquête d’habilitation n’était pas complète et comportait des faussetés. L’enquêteur aurait dû rencontrer d’autres témoins. Il n’avait pas une connaissance suffisamment complète du dossier et des vérifications, il n’y en a pas eu beaucoup », a déploré MAlexandre Cayer.

« Je ne dirais pas que l’enquêteur était biaisé au jour 1 de son enquête mais son travail l’est. Il devait y avoir un coupable, Yan Pellerin, et il n’a pas semblé intéressé à interroger d’autres personnes », a poursuivi l’avocat.

MCayer a relevé le fait qu’à 50 reprises, sur une période de 20 ans, Yan Pellerin a obtenu un permis de combattant, jusqu’à tout récemment, et qu’il a passé avec succès deux enquêtes d’habilitation sécuritaire même si ses liens avec Daniel Fontaine et Steve Duquette étaient connus.

« Il a été correct durant 20 ans et la Régie n’aurait rien fait depuis 20 ans ? Est-ce qu’il se peut qu’aujourd’hui, il y ait un peu d’entêtement dans le dossier de Yan Pellerin », a demandé MCayer.

Les juges administratifs de la RACJ, MNatalia Ouellette et MMarc Savard, ont trois mois pour rendre leur décision.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.