(Québec) La police de Québec se demande comment des agents et des commissaires aux libérations conditionnelles ont pu laisser un homme au passé brutal fréquenter des travailleuses du sexe sur son territoire.

« Quelqu’un qui est en libération conditionnelle, en semi-liberté, obtenir des services sexuels moyennant rétribution… C’est un crime au Code criminel », a rappelé vendredi le directeur du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ), Robert Pigeon.

« Je me pose des questions : comment quelqu’un en semi-liberté peut commettre des infractions criminelles sans remonter au pénitencier ? se demande M. Pigeon. C’est une question importante, parce que le Code criminel le prévoit. »

PHOTO PASCAL RATTHÉ, LE SOLEIL

Robert Pigeon, directeur du SPVQ

Eustachio Gallese est accusé du meurtre de Marylène Lévesque, 22 ans. Les deux se seraient rencontrés dans un salon de massage érotique de la capitale, avant de se donner un rendez-vous fatidique dans un hôtel.

Gallese, qui a tué son ex-conjointe en 2004, était en semi-liberté. « Une stratégie a été développée afin que vous puissiez rencontrer des femmes, mais seulement afin de répondre à vos besoins sexuels », peut-on lire dans un rapport de la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) daté du 19 septembre dernier.

Cette « stratégie » laisse croire que des agents fédéraux connaissaient ses fréquentations, ce qui fait sourciller le chef de police. Il pense que les agences fédérales qui gèrent les libérations conditionnelles ont maintenant le devoir de s’expliquer.

« Il faut aller au fond de cette affaire-là. Il faut comprendre sur quelles bases on prend des décisions. Je comprends les aspects de réinsertion sociale, je comprends les aspects de réintégration dans la société, mais juste avant ça, il y a l’intérêt public et la sécurité publique qui viennent en premier lieu », lance le grand patron du SPVQ.

« Lorsqu’on est titulaire d’une charge publique, qu’on a une responsabilité de sécurité publique et que notre travail est de préserver l’intérêt public, ça nécessite un examen approfondi. »

Le gouvernement fédéral a annoncé cette semaine la tenue d’une enquête interne menée conjointement par Service correctionnel du Canada et la Commission des libérations conditionnelles. Robert Pigeon s’en réjouit.

Une zone grise

Le SPVQ recense une quinzaine de salons de massages érotiques sur son territoire. Dans les faits, ces lieux sont tolérés, même si la police dit exercer une surveillance continue.

« Il y a une approche qui n’est pas blanche ni noire avec les salons de massages. On sait maintenant que les travailleurs du sexe ne peuvent être poursuivis à part dans certaines exceptions, mais les clients, eux, le peuvent », explique Robert Pigeon.

Ces salons évoluent dans une « zone grise » reconnaît le chef de police. Entre les quatre murs des salons, il est difficile pour les services de police d’intercepter les clients au moment où ils reçoivent un service sexuel.

« Il y a une difficulté d’obtenir des éléments de preuve sur le client. La travailleuse elle-même n’est pas assujetti à des infractions criminelles », reconnaît le directeur du SPVQ.

Le SPVQ assure toutefois qu’ils surveillent de près les salons de massage de la capitale pour s’assurer qu’aucune mineure n’y travaille. « Les mineures ont toujours été et restent notre priorité. »