Le Hells Angel Claude Gauthier a été reconnu coupable mercredi de gangstérisme, de complot, de recel et de trafic de stupéfiants. Le motard de la section de Trois-Rivières exploitait avec des complices un réseau de trafic de cocaïne et de méthamphétamines à Saint-Jean-sur-Richelieu en 2018 et 2019.

Arrêté l’an dernier lors de l’opération Orque, le Hells Angel de 52 ans est le seul membre de ce réseau de trafiquants à avoir réclamé un procès. Il a cependant perdu son pari, puisque le juge Claude Leblond l’a déclaré coupable sur tous les chefs au terme d’un procès de deux mois au palais de justice de Montréal.

La preuve massive amassée par les enquêteurs de l’Escouade nationale de répression du crime organisé (ENRCO) démontre que le Hells Angel collectait une redevance en échange de sa permission de vendre de la drogue sur le territoire de Saint-Jean-sur-Richelieu. L’aspirant Pascal Facchino – devenu membre en règle des Hells Angels en 2019 – gérait le réseau pour son compte. Ce dernier a écopé de huit ans de détention dans cette affaire.

La preuve de la Couronne reposait essentiellement sur des éléments « circonstanciels », comme des centaines de conversations d’écoute électronique, des entrées subreptices de policiers chez des suspects et des vidéos captées chez Claude Gauthier et ses complices grâce à des caméras cachées.

Les conversations d’écoute électronique entre Claude Gauthier et ses complices étaient au cœur du procès. Mais en raison de la piètre qualité de l’enregistrement, la Couronne, la défense et le juge ont tous interprété différemment les propos tenus par les membres du réseau. Néanmoins, selon le juge, ces conversations démontrent que Claude Gauthier détenait un « pouvoir décisionnel » sur la montée des prix de la drogue.

« Dans les conversations enregistrées chez lui, l’accusé parle de trafic de drogue avec [Pascal] Facchino, Robidoux et Méthot. Il connaît les enjeux des différentes perquisitions [de décembre 2018]. Il donne des ordres », analyse le juge.

Entre mai et décembre 2018, Claude Gauthier et l’aspirant Pascal Facchino se sont rencontrés à 59 reprises, presque à chaque fois chez l’accusé. À 10 occasions, Pascal Facchino s’est rendu chez l’accusé après avoir manipulé de l’argent, un constat « troublant », selon le juge.

L’accusé emploie également les mêmes « termes codés » que les autres membres du réseau pour parler de trafic de drogue, comme « paquet, tablettes de bonbons, pilules, machine ». De plus, Claude Gauthier évoque de nouveaux appareils de communication avec Pascal Facchino, dans le but, estime le juge, de « travailler de façon secrète ».

« Le Tribunal réitère qu’il est […] logique de penser qu’après [l’opération] SharQc [en 2009], les Hells Angels aient cherché à se distancer des opérations de trafic de drogue sur le terrain. On peut certainement penser que leur intérêt dans le trafic de stupéfiants n’a pas diminué vu les profits qui y sont reliés. Le contrôle de territoire et le paiement de redevances [apparaissent comme] la meilleure façon de se distancer », analyse le juge.

Les observations sur la peine sont prévues le 18 décembre. Les procureures du Bureau de la grande criminalité et des affaires spéciales, MMarie-France Drolet et MIsabelle Poulin représentent le ministère public, alors que l’accusé est défendu par MMylène Lareau et MAnnie Lahaise.

— Avec Daniel Renaud, La Presse