Même s’il a cessé de prendre ses médicaments au point de se retrouver en plein délire l’été dernier et qu’il représente toujours un risque « important » pour le public, le meurtrier Idelson Guerrier peut conserver sa liberté, a conclu ce printemps la Commission d’examen des troubles mentaux.

Cette triste affaire a fait la manchette en juin 2012. L’homme de 39 ans a tué deux patients à l’hôpital Notre-Dame en les étouffant avec une serviette, alors qu’il rôdait librement dans l’aile psychiatrique pendant une semaine. Il est également passé tout près de tuer deux autres patients de la même façon. Il souffrait alors de schizophrénie paranoïde et entendait des voix.

Accusé de meurtres prémédités et de tentatives de meurtre, Idelson Guerrier a été déclaré non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux par un jury en 2016. Détenu à l’Institut Philippe-Pinel, il a obtenu ses premières sorties six mois après le verdict en raison de ses progrès importants.

Au printemps 2018, la Commission a autorisé sa libération sous conditions, puisqu’il prenait maintenant ses médicaments de « façon optimale », était en « rémission » de sa schizophrénie paranoïde et n’entendait plus de voix. Il ne présentait aussi aucune agressivité depuis des années, selon son psychiatre.

Or, en juillet 2019, Idelson Guerrier a « négligé » de prendre ses médicaments et a appelé l’hôpital pour des « idées délirantes ». Il a ensuite été hospitalisé plusieurs jours. Selon son psychiatre traitant, le DGilles Chamberland, il est « inquiétant » qu’Idelson Guerrier n’ait dit à personne qu’il avait cessé sa médication l’an dernier, indique-t-on dans la décision du 13 avril dernier.

Idelson Guerrier assurait pourtant en février 2019 qu’il interpellerait son psychiatre traitant s’il ne se sentait pas bien. Il se disait aussi conscient qu’il pouvait « devenir très dangereux lorsque son état mental est instable ». C’est pourquoi il souhaitait prendre une médication « à très long terme » et qu’il n’oubliait « jamais » de prendre celle-ci. La Commission avait alors relevé son « excellente autocritique à l’égard de son état mental ».

Des crimes « extrêmement graves »

Idelson Guerrier est paralysé d’un bras, depuis qu’il a été victime d’une grave agression, il y a deux ans, alors qu’il s’était interposé devant un homme qui s’en prenait à une serveuse. Il ne peut plus travailler depuis cette attaque et habite chez sa mère. Son psychiatre relève qu’il ne s’est pas désorganisé à la suite de cette agression.

Malgré son état, Idelson Guerrier se dit « heureux » de sa vie. « Il aime être à la maison, dit-il, avec sa famille », souligne-t-on. Toutefois, il se retrouve « plutôt isolé », puisqu’il s’est « retiré de son réseau social ». « Il a quelques symptômes négatifs », souligne le DChamberland.

« La Commission retient de la preuve que monsieur a été réhospitalisé au cours de la dernière année, au motif d’idées délirantes alors qu’il avait négligé de prendre sa médication. Les gestes pour lesquels monsieur a reçu des verdicts NCR [non criminellement responsable] sont extrêmement graves », conclut la Commission.

Mais ce troublant épisode de délire n’a semblé avoir aucune influence sur la décision du tribunal administratif, puisque sa libération sous conditions a été maintenue, comme le recommandait le DChamberland.

La Commission estime pourtant qu’Idelson Guerrier « représente toujours un risque important pour la sécurité du public, en raison de son état mental ». Notons que si ce n’était pas le cas, la Commission devrait le libérer inconditionnellement.

En vertu de la loi, la Commission doit se baser sur trois critères pour prendre sa décision, soit l’état mental de M. Guerrier, l’objectif de favoriser sa réinsertion sociale et, surtout, la nécessité de protéger le public face aux personnes dangereuses. Il devra revenir devant la Commission en février prochain.