(Fort McMurray) Un chef autochtone du nord de l’Alberta soutient avoir été agressé par des agents de la GRC au cours d’une arrestation pour une simple question d’étiquette d’immatriculation expirée et réclame une enquête gouvernementale.

« Parce que nous sommes une minorité, personne ne parle pour nous, a déploré le chef des Chipewyans d’Athabasca, Allan Adam, au cours d’une conférence de presse, samedi. Chaque fois qu’un des nôtres commet quelque chose de pas correct, [la GRC] semble utiliser une force excessive. Il faut que ça cesse. Ça suffit ! »

M. Adam a raconté que sa femme et sa nièce et lui quittaient un casino vers 2 h, le 10 mars dernier.

Le groupe s’est rendu dans son camion, dont les plaques d’immatriculation étaient récemment arrivées à expiration, dans le stationnement du centre commercial Peter Pond, au centre-ville de Fort McMurray, en Alberta, lorsque des agents ont fait face au groupe.

Allan Adam a raconté qu’un véhicule de police s’est arrêté derrière eux alors qu’il déplaçait un siège pour enfant. Monsieur Adam aurait alors demandé à l’officier pourquoi la police le harcelait en lui mentionnant qui il était.

Le chef des Chipewyans d’Athabasca aurait ensuite dit à l’officier qu’il allait rapporter la situation à son supérieur.

Selon le témoignage du chef autochtone, l’officier lui aurait ordonné de s’éloigner en indiquant qu’il n’avait pas besoin de lui parler, et Allan Adam affirme qu’il est alors retourné dans son camion où sa femme l’attendait, sur le siège du conducteur.

Allan Adam aurait alors averti sa femme qu’ils n’étaient pas autorisés à quitter les lieux. Celle-ci aurait répondu : « Pourquoi ? », avant de mettre le camion en marche.

Ensuite, selon le témoignage du chef autochtone, l’officier a frappé à la fenêtre du conducteur en criant.

La femme aurait ensuite baissé la fenêtre et l’officier aurait entré ses bras à l’intérieur du véhicule pour mettre le levier de vitesses en position de stationnement avant d’ordonner au couple de ne pas déplacer le camion, car l’immatriculation de celui-ci était expirée.

« Et puis ils ont commencé à discuter et à se disputer », a déclaré Allan Adam.

L’officier aurait malmené la femme avant d’appeler d’autres policiers en renfort.

« [Un des policiers] m’a fait, comme on dit dans le milieu de la lutte, la prise de la corde à linge », a-t-il relaté.

Au cours de l’affrontement, M. Adam a été profondément coupé à l’intérieur de la bouche. Il dit être parvenu à peine à garder conscience. Il a aussi senti que quelqu’un l’avait frappé dans le dos.

Le chef autochtone a été détenu jusqu’à 9 h 30, le lendemain matin, a indiqué son avocat, Brian Beresh.

M. Adam a été accusé d’avoir résisté à son arrestation et d’avoir commis des voies de fait contre un policier dans l’exercice de ses fonctions, a indiqué samedi le détachement de la GRC de l’Alberta, par communiqué. Le chef autochtone comparaîtra le 2 juillet devant la Cour provinciale, à Wood Buffalo.

La GRC se défend en disant que ce 10 mars, vers 2 h, elle vérifiait un véhicule arrêté dont les plaques d’immatriculation étaient expirées. Il y aurait eu confrontation avec M. Adam. Celui-ci serait retourné vers le véhicule et aurait ensuite résisté à son arrestation.

Elle dit que ses agents ont dû recourir à la force pour arrêter le chef autochtone.

Une caméra installée à l’intérieur d’un véhicule de police a capté l’incident. Des superviseurs ont regardé la vidéo.

« Il a été déterminé que les actions des agents étaient raisonnables et n’exigeaient pas le recours à une enquête externe », soutient le corps policier.

Le chef a rendu publiques deux vidéos de la confrontation ainsi qu’une photo de lui-même qui, selon lui, a été prise le lendemain de l’arrestation. On le voit montrant une large ecchymose autour de l’œil droit et du sang séché sur la joue.

PHOTO ALLAN ADAM, VIA REUTERS

Une vidéo de 41 secondes, filmée par un passant, montre un agent ordonner à la femme de M. Adam, qui était au volant, de sortir du véhicule parce qu’elle était en étant d’arrestation. Celle-ci a obéi en demandant les raisons de son arrestation.

Dans une deuxième vidéo, d’une durée de trois minutes, on voit M. Adam s’identifier et indiquer à la police qu’il saignait.

« Pourquoi m’avez-vous fait ça ? Je saigne », lance-t-il.

Il a crié des jurons au cours de l’affrontement.

Les deux vidéos sont sombres, a reconnu Me Beresh. Il a fait remarquer que la GRC avait un enregistrement de meilleure qualité qu’il a vu, mais ne peut diffuser.

L’avocat a exhorté la GRC à diffuser leur vidéo, « afin que la vérité soit connue ».

Le porte-parole de la GRC Patrick Lambert a déclaré que la police n’a pas pour habitude de divulguer au grand public des documents susceptibles d’être utilisés dans le cadre de poursuites.

« Sa comparution devant le tribunal est fixée au 2 juillet et des informations seront révélées au palais de justice », a déclaré Patrick Lambert.

Me Beresh a également réclamé une enquête indépendante sur cet incident. Selon lui, tous les policiers devraient porter une caméra corporelle quand ils sortent à l’extérieur du poste.

Me Beresh dit que les vidéos montrent bien que M. Adam n’a pas agressé un agent ou résisté. Son erreur, selon lui, a été de demander les raisons de son arrestation.

« Il défiait l’autorité. Il défiait l’uniforme. Ce n’est pas permis pour une organisation de type militaire comme la GRC. »

The Alberta Serious Incident Response Team, qui enquête sur les décès ou les blessures impliquant des policiers, a déclaré qu’elle ferait la lumière sur l’incident.