(Saint-Jérôme) Sept ans avant de tuer sa conjointe Véronique Barbe, Ugo Fredette a été arrêté dans des circonstances troublantes de harcèlement et de violence conjugale. Nu comme un ver, le meurtrier aurait poursuivi sa nouvelle copine dans la rue, menant celle-ci à lui rouler dessus en voiture. Une histoire rocambolesque jamais révélée au jury.

« Cette déclaration nous permet de réaliser que sept ans avant les évènements, monsieur s’était retrouvé dans une situation pratiquement identique. Malgré la gravité de ce qui s’était passé à ce moment, monsieur ne semble pas avoir pu tirer de leçon », analyse le psychiatre Gilles Chamberland dans son rapport déposé en preuve cette semaine aux observations sur la peine d’Ugo Fredette.

La Couronne réclame d’imposer à Ugo Fredette une période d’inadmissibilité de 50 ans à la libération conditionnelle – du jamais vu au Québec – pour les meurtres au premier degré de Véronique Barbe et d’Yvon Lacasse en 2017. La défense conteste la constitutionnalité de cette peine « cruelle et inusitée ».

Le rapport du DChamberland lève le voile sur le contexte de violence conjugale qui a culminé par l’arrestation d’Ugo Fredette à l’été 2010, au tout début de sa relation avec Véronique Barbe. Un élément fort pertinent à la présente affaire, puisque Ugo Fredette a tué sa conjointe alors qu’il n’acceptait pas leur rupture.

Selon une déclaration de Mme Barbe en août 2010, Ugo Fredette était « en colère » que sa nouvelle conjointe sorte avec ses amis. Déjà, à cette époque, il refusait que Véronique Barbe rompe avec lui. « Il refuse de quitter l’appartement jusqu’à ce que madame menace d’appeler les policiers. Monsieur revient néanmoins cogner chez elle dans la nuit », indique le rapport du psychiatre.

« Craignant » Ugo Fredette, Véronique Barbe se présente au poste de police le 27 août 2010, mais ne porte pas plainte, « car elle culpabilise à l’idée que monsieur ait un dossier criminel ». Le lendemain, elle réitère sa volonté de ne plus avoir de contacts avec Ugo Fredette, mais celui-ci « se met en colère » et tente de se donner la mort.

Le lendemain matin, Véronique Barbe craint Ugo Fredette et « cède » donc à consentir à un rapport sexuel « dans le but d’agir normalement ». Lorsque ce dernier se rend à la salle de bain, elle en profite pour quitter l’appartement en pyjamas et pieds nus. Suit une scène rocambolesque.

« Lorsque monsieur s’en aperçoit, il court derrière elle, nu, dans la rue. Madame se cache dans sa voiture. Monsieur cogne dans la fenêtre, tente d’ouvrir la portière, s’accroche au miroir, monte sur le capot du véhicule. Madame met le véhicule en marche et monsieur tombe par terre. Elle croit avoir roulé sur sa jambe avec son pneu arrière. Elle s’immobilise et contacte les services d’urgence. Monsieur fuit en direction de l’appartement », explique le rapport.

Risque élevé d’évasion pour Ugo Fredette

Selon le DChamberland, cet événement a pu avoir des répercussions sur les tragiques circonstances du meurtre, puisque Véronique Barbe « aurait développé une forme d’impuissance à se retirer de l’emprise de monsieur ». Même si Ugo Fredette a rencontré un psychiatre en 2010, il n’a pas été en mesure de se questionner, soutient le psychiatre.

Selon l’expert de la Couronne, Ugo Fredette a un trouble de personnalité narcissique. L’expert de la défense, DLouis Morissette, affirme pour sa part que le détenu a des traits narcissiques, mais ne présente aucun trouble.

Ugo Fredette a finalement été accusé d’agression armée, de séquestration de harcèlement criminel en 2010, selon les rapports du psychiatre et des services correctionnels. Néanmoins, il ne reste aucune trace de ces accusations dans son dossier criminel. Les accusations auraient été « retirées », selon Ugo Fredette, indique un rapport.

Selon le rapport des services correctionnels déposé en preuve, Ugo Fredette aurait indiqué avoir passé quelques jours en détention, puis avoir bénéficié d’une libération sous engagements. Le meurtrier aurait possiblement fait l’objet d’un interdit de contacts avec Véronique Barbe – un article 810 –, mais aurait avoué ne pas l’avoir respecté d’un commun accord avec celle-ci.

Ugo Fredette a non seulement une cote de sécurité maximum, mais affiche un risque d’évasion élevé, conclut un rapport d’évaluation des services correctionnels. « En somme, actuellement, il semble exister plusieurs facteurs militant en faveur d’un risque élevé d’évasion », indique le rapport qui souligne les circonstances de la fuite d’Ugo Fredette.

Rappelons qu’après avoir tué Véronique Barbe, Ugo Fredette a pris la fuite avec un enfant, enclenchant la plus longue alerte AMBER du Québec. Pendant sa cavale, il a battu à mort Yvon Lacasse à une halte routière dans le but de lui voler son véhicule. Il a finalement été arrêté en Ontario au terme d’une poursuite policière et d’un face à face sous haute tension avec les policiers.

Les audiences sur la peine se déroulent toute la semaine au palais de justice de Saint-Jérôme devant la juge Myriam Lachance.