Ismaël Habib, condamné en septembre 2017 à neuf ans de pénitencier pour avoir tenté de quitter le Canada afin de joindre le Groupe armé État islamique, demande la tenue d’un nouveau procès.

Habib est le premier adulte canadien à être condamné au terme d’un procès en vertu la nouvelle loi qui criminalise depuis 2013 le simple fait d’essayer de quitter le Canada afin de participer aux activités d’un groupe terroriste. Son dossier a été entendu lundi matin par la Cour d’appel.

Il conteste à la fois le verdict de culpabilité et la peine qui lui a été imposée. C’est la technique d’enquête des policiers, une opération appelée Mr Big qui consiste à fabriquer une fausse organisation criminelle pour extirper des aveux à l’accusé, qui est remise en question dans ce dossier.

Ismaël Habib a été arrêté en mars 2016. Son procès a révélé que la police enquêtait sur lui depuis des mois. Plusieurs éléments ont fait qu’il s’est retrouvé dans la mire des enquêteurs. Il s’est rendu en Syrie en 2013, où il aurait passé du temps avec des groupes djihadistes. De retour au Québec, il a fait plusieurs tentatives pour obtenir un faux passeport. Sa femme et ses deux enfants se trouvaient à l’époque quelque part dans le territoire de l’EI.

Pour prouver son intention d’aller les rejoindre, la GRC a tissé autour de lui une vaste toile. Les policiers ont créé une fausse organisation criminelle de falsification de passeports et de passeurs qui pouvait prétendument l’amener en Syrie. Habib a admis à l’agent de police qui jouait le patron de cette organisation son intention d’aller rejoindre le groupe armé État islamique.

C’est la fiabilité de cet aveu que son avocat, Maxime Chevalier, a remis en doute lundi. Selon lui, le juge Serge Delisle de la Cour du Québec, qui a rendu le jugement de culpabilité, a erré en admettant en preuve les déclarations de son client issues de l’opération Mr Big. Me Chevalier a soulevé des questions quant au rôle d’un personnage qu’il considère clé dans l’infiltration, un agent civil proche de Habib qui n’a pas témoigné au procès.

« Ils avaient un contact étroit. C’était presque un conseiller spirituel. Ils avaient une relation d’amitié. C’était quoi l’influence de cette personne-là sur les aveux ? a-t-il demandé devant le tribunal. Comment peut-on déterminer que Habib n’a pas été influencé pour plaire à la prétendue organisation criminelle ? »

Me Chevalier estime également que la peine de neuf ans de pénitencier est trop sévère et qu’elle n’est pas proportionnelle à la faute, pour un crime qui, a-t-il souligné à La Presse en marge de l’audience, n’a eu aucune conséquence.

La couronne plaide qu’au contraire, les déclarations du Québécois étaient admissibles en preuve et que le juge n’a commis aucune erreur. « La preuve démontre que l’appelant a tenté de quitter le Canada pour se rendre en Syrie et joindre l’EI », selon le mémoire déposé devant le tribunal.

Les trois juges de la Cour d’appel ont pris l’affaire en délibéré.