De Lachute à Rouyn-Noranda, puis de Maniwaki jusqu’en Ontario. Une cavale de centaines de kilomètres. En pleine alerte AMBER, les enquêteurs ont méticuleusement retracé le parcours d’Ugo Fredette, alors qu’il était recherché pour le meurtre de sa conjointe Véronique Barbe et la disparition d’Yvon Lacasse, il y a deux ans.

Au sixième jour du procès d’Ugo Fredette pour deux meurtres au premier degré, le jury a visionné des vidéos de surveillance qui décortiquent chronologiquement la cavale d’Ugo Fredette, les 14 et 15 septembre 2017.  

Suivre la trace d’Ugo Fredette n’a pas été une mince tâche, a résumé l’enquêteur Matthieu Rollin, 14etémoin de la Couronne. Pas moins de 25 enquêteurs ont été déployés sur le terrain pour retracer le parcours de l’accusé, alors que l’alerte AMBER battait son plein.

La vidéo de surveillance de la halte routière de Lachute a été déterminante pour le travail des policiers. C’est là que l’accusé a abandonné son camion F-250 pour prendre le Honda CRV d’Yvon Lacasse, une heure après la mort de Véronique Barbe. À partir de cette vidéo, les enquêteurs ont mis la main sur des caméras de surveillance de ville en ville en direction de l’Abitibi.

Parti de la halte routière à 18 h 12, le véhicule volé est aperçu sur une caméra à 19 h 07 à Arundel. Quelques minutes plus tard, on le voit se rendre en direction de Harrington, puis revenir 20 minutes plus tard. Ces images seront cruciales pour retrouver, quelques jours plus tard, le corps d’Yvon Lacasse.

« On a orienté les équipes de recherche à 10 minutes et le corps était à cet endroit. Dans un secteur boisé comme celui-là, les chances de retrouver un corps sont très faibles, c’est un chemin forestier, les caméras nous ont vraiment permis de circonscrire nos recherches », explique l’enquêteur Rollin.  

Les enquêteurs ont ensuite découvert qu’Ugo Fredette s’était rendu à Mont-Laurier, puis à Val-d’Or pendant la nuit du 14 au 15 septembre 2017. Vers 1 h du matin, on le voit d’ailleurs mettre de l’essence dans sa voiture à Val-d’Or. À l’intérieur de la station-service, on constate que son jean n’est pas attaché. Un élément sur lequel le procureur Me Steve Baribeau a beaucoup insisté.  

Une carte de la cavale d'Ugo Fredette

Des caméras montrent ensuite Ugo Fredette qui tente de louer une chambre dans plusieurs hôtels de Val-d’Or. Mais aucune chambre ne semble disponible. Ce n’est qu’à Rouyn-Noranda, vers 3 h, que l’accusé réussit à s’arrêter pour dormir.  

Une transaction bancaire au Tim Hortons de Maniwaki à 9 h 54, le lendemain, permet aux enquêteurs de reprendre la trace d’Ugo Fredette. Il sera ensuite arrêté vers 16 h 55 le même jour à Napanee, en Ontario, alors qu’une alerte AMBER avait été déclenchée dans la province voisine.

La Couronne tente de prouver qu’Ugo Fredette, incapable d’accepter leur rupture, a tué sa conjointe avec deux couteaux dans leur résidence de Saint-Eustache, le 14 septembre 2017, avant de prendre la fuite avec un enfant. Il aurait ensuite battu à mort Yvon Lacasse à une halte routière de Lachute pour lui voler son véhicule et aurait jeté son corps dans le bois.

Le visage écrasé contre le sol

Le jury a appris vendredi l’étendue des blessures des deux victimes et la cause de leur décès. Le Dr André Bourgault a conclu que Véronique Barbe avait été poignardée à 17 reprises par une arme « piquante et tranchante », comme un couteau. 

Parmi les plaies répertoriées, 14 se situent au thorax de la victime, dont quatre ont atteint l’aorte du cœur. Les deux plaies au majeur gauche de la victime, résultat du même coup, pourraient être une plaie de défense, selon le pathologiste judiciaire. Une coupure profonde près de l’œil gauche de la victime a aussi été relevée.

L’autopsie du corps d’Yvon Lacasse – retrouvé des jours plus tard dans le bois –  s’est révélée difficile en raison de son état de putréfaction avancée. Néanmoins, le Dr Bourgault a été en mesure de conclure que l’homme de 71 ans est mort d’un « traumatisme facial contondant sévère » causé avant sa mort. 

Selon une hypothèse du pathologiste, Yvon Lacasse a pu se faire « écraser le visage contre le sol ». En contre-interrogatoire, l’expert n’a toutefois pas exclu que des animaux aient pu causer des fractures à la victime après son décès, bien que ce soit « improbable ».

Le pathologiste a aussi relevé sur le corps plusieurs fractures à la tête et au dos. Cette dernière blessure suggère d’ailleurs que le coup serait venu « à l’arrière » de la victime. Une blessure à la main suggère également une « plaie de défense », alors que la victime tentait « de se protéger ». 

Le procès se poursuit mardi au palais de justice de Saint-Jérôme.