(Ottawa) Les juges recevront bientôt des lignes directrices supplémentaires sur ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas faire après leur départ à la retraite, selon des organisations qui examinent la conduite des avocats et des juges.

Le rapport du commissaire fédéral à l’éthique sur le rôle de Justin Trudeau dans l’affaire SNC-Lavalin a mentionné que les opinions juridiques d’anciens juges de la Cour suprême avaient été grandement recherchées par maints acteurs de la controverse.

Le Conseil canadien de la magistrature et la Fédération des ordres professionnels de juristes collaborent à la mise à jour des principes éthiques applicables aux juges, notamment en ce qui concerne leur après-carrière.

« Les juges, comme nous tous, ont une plus grande espérance de vie et une qualité de vie supérieure, a rappelé une porte-parole du Conseil canadien de la magistrature Johanna Laporte. Certains prennent tôt leur retraite. Cela signifie que de nombreux anciens juges veulent continuer à contribuer de manière significative à la société. »

Les cours et les barreaux provinciaux appliquent déjà des règles pour les juges qui renouent avec la pratique du droit. On leur impose notamment une période de transition obligatoire avant qu’ils puissent plaider à nouveau de nouveau devant un tribunal.

Les nouvelles directives pourraient aller plus loin.

Mme Laporte signale qu’une majorité de ceux qui ont participé aux consultations publiques sur cette question conviennent que des juges ne devraient pas plaider une cause devant un tribunal. Un plus grand nombre de participants croient que les juges à la retraite ne devraient pas pouvoir tirer parti de leur ancien poste pour obtenir un avantage commercial.

« [Nous] avons discuté de la manière dont les principes éthiques peuvent mieux compléter les règles », a-t-elle dit.

Mme Laporte s’attend à ce que les nouvelles lignes directrices soient publiées l’an prochain.

De son côté, la Fédération des ordres professionnels de juristes dit avoir mené des consultations sur des possibles modifications qui « imposeraient des restrictions et des obligations supplémentaires aux juges à la retraite qui retrouveraient la pratique du droit ».

Un sujet délicat

Selon Michael Spratt, un avocat de droit pénal d’Ottawa, il peut être délicat de proposer des règles permettant aux juges à la retraite de partager leur expertise.

« Il y a un risque à être trop restrictif dans les règles sur ce que les acteurs judiciaires peuvent faire. Nous risquons peut-être de perdre de bons candidats à la magistrature et nous pourrions également nous priver d’une très, très bonne expertise pouvant offrir un avantage réel. »

La tentative du cabinet du premier ministre fédéral d’impliquer des juges de la Cour suprême à la retraite pour tenter de convaincre la procureure générale Jody Wilson-Raybould de ne pas lancer une poursuite pénale contre SNC-Lavalin préoccupe l’avocat.

« La solution la plus simple est que les gouvernements se refusent à utiliser des juges ou des anciens juges comme des pions politiques, a souligné Me Spratt. Tenter d’utiliser des juges à des fins politiques risque de miner la confiance du public envers un pilier très important de notre démocratie, à savoir le pouvoir judiciaire. »

Mme Wilson-Raybould, qui a elle-même engagé un ancien juge de la Cour suprême, Thomas Cromwell, pour la conseiller sur ce qu’elle pouvait dire publiquement au sujet de la controverse sur SNC-Lavalin, a dit que son plus gros problème était qu’elle était tenue dans l’ignorance de l’implication d’autres juges à la retraite.

« Les gouvernements et les fonctionnaires sont libres de demander conseil à qui ils veulent, y compris à des juges à la retraite. Je ne jugerai pas à savoir si cela convenait. Ça arrive, a-t-elle commenté. Ce que je ressens est difficile à comprendre. Je ne veux pas utiliser ce mot, mais ce qui est étranger, je ne veux pas utiliser ce mot, mais je le fais quand même, c’est que cela se soit passé à l’insu de la procureure générale du Canada. »