(Winnipeg) Des hélicoptères et un avion militaire spécialisé ont patrouillé du haut des airs tandis que des policiers armés ont fait des recherches au sol dans le nord du Manitoba à la recherche de deux suspects de meurtres perpétrés en Colombie-Britannique.

Certaines militantes ne peuvent que constater le contraste avec les ressources utilisées pour la recherche de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées.

« Ça fait un peu sourciller à cause de la réaction différente », note Sheila North, ancienne grande chef et militante pour les femmes autochtones disparues et assassinées.

La chasse à l’homme massive tient le pays en haleine depuis que Bryer Schmegelsky, 18 ans, et Kam McLeod, 19 ans, ont été nommés suspects de trois meurtres la semaine dernière. Le professeur d’université Leonard Dyck, l’Américaine Chynna Deese et son petit ami australien Lucas Fowler ont été retrouvés morts en juillet dans le nord de la Colombie-Britannique.

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Bryer Schmegelsky

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Kam McLeod

Mme North affirme qu’il est important que les suspects soient arrêtés, car ils pourraient constituer un risque sérieux pour le public.

Mais elle se demande où est le même sentiment d’urgence lorsqu’une femme ou une fille autochtone ne peut être retrouvée.

Mme North rappelle le cas de Jennifer Catcheway, en 2008. Elle a été vue pour la dernière fois à Portage la Prairie, au Manitoba, le soir de son 18e anniversaire. Lorsque Wilfred et Bernice Catcheway ont déclaré à la police que leur fille était disparue, on leur a dit qu’elle était probablement en train de faire la fête, raconte Mme North.

Pendant plus d’une décennie, les Catcheway ont effectué leurs propres recherches des rivières, des lacs, des forêts et des Premières Nations à proximité.

Mme North ajoute qu’elle se souvient également de sa grand-mère âgée de 51 ans, Mildred Flett, qui avait été vue pour la dernière fois à Winnipeg en 2010. Son ex-mari a raconté qu’il avait été difficile d’intéresser la police à son cas.

Mme Flett était originaire de la Nation crie Testaskweyak de Split Lake, au Manitoba, où l’on peut encore voir des affiches sur sa disparition. Bryer Schmegelsky et Kam McLeod ont été repérés dans la même communauté avant la découverte du véhicule dans lequel ils se trouvaient à proximité de Gillam, ce qui a amené la police à concentrer ses recherches dans cette région.

Mme North souligne qu’il y a plus de 1200 parents de femmes et de filles autochtones disparues ou assassinées qui regardent la GRC faire tout son possible pour retrouver les deux suspects du meurtre. Ils se demandent peut-être aussi pourquoi ils n’ont pas pu recevoir plus d’aide, ajoute-t-elle.

« Les familles qui effectuent leurs propres recherches se sentent un peu laissées pour compte et ne sont pas respectées de la même manière que ces autres familles », soutient-elle.

Darlene Okemaysim-Sicotte a vu de nombreuses familles peiner pour organiser des recherches en tant que coprésidente d’Iskwewuk E-wichiwitochik (Femmes marchant ensemble), un groupe local qui soutient les familles de femmes autochtones disparues et assassinées en Saskatchewan.

Sa cousine, Shelley Napope, 16 ans, a été assassinée par le tueur en série John Martin Crawford en 1992.

Mme Okemaysim-Sicotte dit qu’elle soutient les efforts déployés pour retrouver Bryer Schmegelsky et Kam McLeod et qu’aucune vie n’en vaut plus qu’une autre.

Mais la chasse à l’homme qui leur a été consacrée a clairement montré qu’il y a les moyens, l’argent et le soutien du public pour mener une recherche à grande échelle en cas de besoin, dit-elle.

Mme Okemaysim-Sicotte espère que les gens s’en souviendront lors de la prochaine disparition d’une femme ou d’une fille autochtone.

« Le monde regarde », affirme-t-elle.