(Ottawa) La Cour suprême du Canada refuse d’entendre l’affaire de la vente de véhicules blindés canadiens à l’Arabie saoudite.

La croisade du professeur de droit et ex-député bloquiste et péquiste Daniel Turp contre cette décision du gouvernement canadien est donc terminée dans ce dossier.

Mais il n’entend pas baisser les bras. Le constitutionnaliste a promis d’explorer d’autres avenues pour continuer à se battre.

Comme c’est toujours le cas, le plus haut tribunal du pays n’a pas donné de motifs pour sa décision rendue jeudi.

M. Turp avait contesté cette décision du gouvernement d’accorder les licences d’exportation pour une transaction de 15 milliards en équipement militaire. Les véhicules blindés légers en question sont construits à London, en Ontario, par la compagnie General Dynamics Land Systems.

Il était d’avis que le Canada n’avait pas analysé les risques pour les civils au Yémen avant d’accorder ces licences d’exportation pour la vente de véhicules militaires au régime saoudien, qui gouverne un pays présentant l’un des pires bilans en matière de droits de la personne et qui est actuellement impliqué dans un conflit armé au Yémen.

La décision était déraisonnable, a-t-il plaidé, demandant qu’elle soit revue.

Dans les motifs du jugement rendu en juillet 2018, la Cour d’appel fédérale a soutenu que le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Stéphane Dion, a tenu « compte de tous les facteurs pertinents » avant de donner le feu vert à la livraison des véhicules blindés légers.

« Non seulement le ministre a-t-il considéré les facteurs économiques et commerciaux, mais il a considéré les questions de droit humanitaire et de droits de la personne », précisait la Cour d’appel.

Il ne peut faire de doute que l’appelant (Daniel Turp) est en désaccord avec la décision du ministre, mais malheureusement pour lui, l’appréciation de la preuve aux fins d’accorder ou non des licences d’exportation a été confiée au ministre par le Parlement, était-il écrit dans la décision.

Le contrat de 15 milliards a été conclu sous le gouvernement Harper, mais c’est le gouvernement Trudeau qui a octroyé les permis d’exportation.

M. Turp avait été débouté par la Cour fédérale en janvier 2017 et la Cour d’appel fédérale a rejeté son appel à l’unanimité en juillet 2018. C’est pourquoi il voulait soumettre l’affaire à la Cour suprême, qui vient de refuser d’infirmer les décisions antérieures.

En entrevue, il a qualifié la décision de la Cour suprême de ne pas traiter de la justesse de l’exportation d’armes de « décevante ».

Mais « je n’ai pas dit mon dernier mot », a-t-il ajouté du même souffle.

Il a rappelé qu’il a une autre cause devant les tribunaux. Elle avait été suspendue pour voir le résultat de celle qui s’est terminée jeudi avec le refus de la Cour suprême.

Maintenant, il peut la réactiver s’il le juge bon, dit-il.

Cette cause avait été intentée devant la Cour fédérale après des révélations faites par le quotidien Globe and Mail à l’été 2017. Celui-ci rapportait l’usage apparent de véhicules blindés d’une autre entreprise canadienne, dans un conflit avec des citoyens saoudiens.

De plus, M. Turp a souligné que le Canada s’apprête à ratifier le Traité sur le commerce des armes, ce qui pourrait ouvrir d’autres possibilités de recours, juge-t-il.

« Le conflit se poursuit au Yémen, rappelle le professeur. Il y a toujours un risque que les chars canadiens puissent être utilisés en Arabie ou au Yémen. »