Adèle Sorella, cette mère de Laval reconnue coupable du meurtre de ses deux filles, a violé la confiance qu'elles lui avaient accordée pour assurer leur sécurité, a déclaré vendredi le procureur de la Couronne, recommandant pour elle une peine minimale de 14 ans de prison.

Le 5 mars dernier, un jury a reconnu la femme de 53 ans coupable de deux chefs de meurtre au deuxième degré relativement au décès de ses filles, Amanda, neuf ans, et Sabrina, huit ans. Les fillettes avaient été retrouvées mortes dans la maison familiale à Laval le 31 mars 2009.

Une condamnation pour meurtre au deuxième degré entraîne automatiquement une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant au moins 10 ans. La Couronne a recommandé vendredi que Sorella purge une peine minimale de 14 ans de prison, tandis que la défense a suggéré au tribunal le minimum de 10 ans.

Mais personne n'a fait de déclarations d'impact sur les victimes au nom des fillettes, a déploré Nancy Roy, directrice de l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues. Pour Mme Roy, les fillettes sont les victimes, oubliées, de l'indifférence de leurs parents dans cette affaire. « Personne n'était là pour les représenter », a-t-elle déploré vendredi, en marge du procès.

Le procureur Simon Lapierre a déclaré à la juge que la protection des jeunes enfants est l'une des valeurs primordiales de la société et que tout manquement à cette obligation doit être dénoncé avec la plus grande fermeté. Selon M. Lapierre, en assassinant ses filles, Adèle Sorella a rompu de façon extrêmement grave le lien de confiance.

M. Lapierre a par ailleurs souligné l'absence de déclaration des victimes lors de la détermination de la peine, mais il a ajouté que cela ne voulait pas dire que la mort des filles n'avait pas fait beaucoup de peine à sa famille. Il a indiqué que même si personne n'est venu témoigner des conséquences des crimes, il est clair que ceux-ci ont eu un effet dévastateur sur les proches.

Il a ajouté que le père des fillettes, Giuseppe de Vito, un gangster retrouvé mort en prison en 2013, avait exprimé sa tristesse pour leur mort et son regret de ne pas les avoir aidées. Les grands-parents, les oncles et une enseignante des fillettes ont tous témoigné au procès du choc et du chagrin causés par la mort des filles.

Une enfance difficile

Mais Mme Roy a ajouté que la présence de membres de la famille et d'êtres chers à l'audience de détermination de la peine pouvait avoir une incidence sur le tribunal. Elle a rappelé que les victimes avaient connu une vie difficile, avec une mère souffrant de maladie mentale et un père criminel. Mme Roy estime que l'inculpée devrait accepter sa responsabilité à cet égard.

Lorsque le temps est venu pour la défense de présenter ses arguments, l'un des avocats d'Adèle Sorella a noté la fragilité mentale de sa cliente et le fait qu'elle ne pose aucun risque pour la société. Pierre Poupart a cité un certain nombre de décisions judiciaires antérieures qui suggèrent, selon lui, qu'une peine exemplaire ne sert à rien lorsque la maladie mentale est un facteur en cause.

Lors de son procès, Adèle Sorella a déclaré n'avoir que peu de souvenirs du jour où ses filles ont été retrouvées mortes. Des experts médicaux qui ont témoigné pour la défense ont déclaré qu'elle avait connu un épisode de dissociation le jour des meurtres.

Les corps des filles ne présentaient aucun signe de violence et la cause de la mort n'a jamais été établie. Un pathologiste a témoigné qu'une chambre hyperbare utilisée dans la résidence pour traiter l'arthrite juvénile de Sabrina était une cause possible de décès par asphyxie.

Sorella a refusé de s'exprimer devant la cour vendredi parce qu'elle se sentait trop émue, mais elle pourrait soumettre une déclaration écrite. La juge Sophie Bourque, de la Cour supérieure, doit prononcer la peine le 26 juin.

Les avocats d'Adèle Sorella ont déjà fait appel du verdict de culpabilité, qu'ils qualifient de déraisonnable et non étayé par les preuves présentées au procès.